Espagne : Après les élections au parlement basque18/05/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/05/une-1714.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Espagne : Après les élections au parlement basque

Les élections au Parlement régional du Pays Basque du dimanche 13 mai ont été marquées par le succès de la coalition nationaliste modérée constituée par le PNV (le Parti Nationaliste Basque) et un autre parti de moindre importance connu sous le sigle EA (Eusko Alkartasuna, Solidarité basque).

L'augmentation du score de cette coalition nationaliste conservatrice, hostile au terrorisme, va de pair avec un important recul de la coalition nationaliste indépendantiste Euskal Herritarok (Citoyens basques) liée à l'ETA qui n'obtient plus que 7 % des voix au lieu des 14 ou 15 % qu'elle avait atteints lors de divers scrutins. Elle avait même obtenu 17,9 % en 1998 à une période où les dirigeants de l'ETA avaient décidé la trêve de leur politique terroriste et le recul actuel sanctionne incontestablement le fait que depuis la fin de l'année 1999 le bilan de la reprise des attentats s'élève à 30 morts.

Mais le fait le plus marquant de ces élections au Parlement régional basque est aussi incontestablement l'échec de la politique du Parti Populaire (PP) qui est au pouvoir à Madrid et qui avait fait le pari de conquérir, moyennant une alliance avec les socialistes, la majorité au Parlement basque en évinçant du pouvoir le PNV qu'il accuse de faiblesse vis-à-vis du terrorisme et de complicité vis-à-vis des indépendantistes.

Depuis plus d'un an les dirigeants du Parti Populaire (PP) ont affirmé leur volonté de reprendre la situation en main au Pays Basque en liquidant l'ETA, et en installant à la tête du gouvernement basque un homme qui symbolise le pouvoir de Madrid, Mayor Oreja qui n'a quitté son poste de ministre de l'Intérieur de l'Etat espagnol (donc responsable entre autres de la répression au Pays Basque) que pour faire campagne au Pays Basque dont il est originaire.

Le PP n'a reculé devant aucune pression, devant aucun chantage vis-à-vis du PNV. Ses dirigeants ont tenté d'entraîner des intellectuels de droite, des personnalités, créé des associations, organisé des mobilisations. Ils ont en partie entraîné dans leur sillage les dirigeants socialistes, ceux de Madrid, comme ceux du Pays Basque. Mais leur stratégie a finalement échoué. Et il suffisait de voir à la télévision les visages déconfits de Mayor Oreja du PP pour mesurer l'ampleur de la déception de ces politiciens qui ont cru que la reprise des attentats par l'ETA allait leur donner l'occasion de régler par la manière forte non seulement le problème du terrorisme mais aussi d'imposer plus fermement au Pays Basque les choix des dirigeants de l'Etat espagnol.

Toujours est-il que dimanche soir 13 mai les dirigeants du PP, même s'ils se félicitaient de la baisse des scores des radicaux liés à l'ETA, ne cachaient pas leur dépit. L'un d'eux affirmait : "Ils tuent le président de notre Parti en Aragon (allusion à un récent attentat), ils mettent une bombe à Madrid et les nationalistes nous balaient... Je ne comprends rien". Mais c'est que le PP, le gouvernement de Madrid et les socialistes ont parié sur une politique d'affrontement avec les nationalistes basques, utilisant démagogiquement les assassinats de l'ETA, manipulant les images à la télévision, présentant les élus du PP et du Parti Socialiste du Pays Basque (PSE) comme des personnes traquées et menacées et traitant de nazis tous ceux qui étaient partisans d'une politique de concertation avec les indépendantistes. Ils s'en sont pris à la langue basque, ils ont accusé le gouvernement basque de manipuler la conscience des enfants dans les écoles basques. Ils n'ont pas caché que pour en finir avec l'ETA, ils choisissaient de s'en prendre à tous les nationalistes et d'éliminer de la scène politique tous ceux qui coopéraient avec les indépendantistes et préconisaient la construction d'un Pays Basque souverain exigeant le respect du droit à l'autodétermination.

Les résultats du scrutin du 13 mai viennent d'apporter une nouvelle fois la démonstration que le choix des dirigeants de Madrid - non seulement ceux du PP, mais aussi ceux qui se sont succédé au pouvoir depuis la fin du franquisme, c'est-à-dire depuis 25 ans - sont par leur refus de donner une issue politique au problème basque les premiers responsables de la situation au Pays Basque. Une situation grave où l'ETA paraît s'apprêter à multiplier les actes terroristes. Une situation qui pèse sur la société basque en la divisant sur le problème des aspirations nationalistes alors que, dans la région, comme dans le reste de l'Espagne, les problèmes des classes populaires sont ceux qui découlent des choix qu'imposent le patronat et les capitalistes de toutes les régions.

Des choix qui font que l'ouvrier des hauts fourneaux ou ceux des chantiers navals du Pays Basque sont dans le même camp social que ceux des travailleurs de la Sintel qui campent depuis des mois sur l'avenue de la Castellana à Madrid parce qu'ils veulent recevoir leur salaire ou que l'ouvrier des grands magasins Corte Inglés licencié pour avoir pris un jus de fruit pendant ses heures de travail.

Partisans de l'indépendance du Pays Basque ou partisans d'un rattachement à l'Espagne, ouvriers du Pays Basque ou d'autres régions, les travailleurs ont des ennemis communs, les capitalistes, les états-majors des partis comme le PP, le Parti Socialiste d'Espagne (PSOE) mais aussi ceux des partis nationalistes au pouvoir en Catalogne ou au Pays Basque. Ils ont aussi des intérêts communs à imposer tous ensemble à ceux qui les exploitent et leur imposent le chômage, les bas salaires et la précarité.

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