Alloune, le vieux guide de la Maison des esclaves de l'île de Gorée, au large de Dakar, au Sénégal, décide un beau jour de partir aux Etats-Unis à la recherche des descendants d'une partie de sa famille qui fut capturée et vendue comme esclave.

Cette Maison des esclaves, par où passèrent pendant près de deux siècles des millions d'esclaves africains déportés dans le nouveau monde, sert de point de départ à la quête d'Alloune, tandis que le point d'arrivée se situe au coeur même de New York, à Little Sénégal, îlot où vivent les immigrés africains de toutes origines. Accueilli chez son neveu, immigré clandestin qui travaille comme chauffeur de taxi, Alloune poursuit sa quête d'identité. Sa rencontre avec Ida, une Afro-Américaine qui vit chichement d'une modeste échoppe, identifiée comme la descendante d'une lignée d'esclaves partis de son village - et donc sa cousine -, est particulièrement pathétique et poignante.

Rejeté par Ida, Alloune parvient toutefois à surmonter son appréhension vis-à-vis d'une culture différente qu'elle ne comprend pas (pour elle, l'Afrique est un lieu où on tue des Américains !). Il finit par lui ouvrir les yeux sur le destin tragique de ses ancêtres, tout en se prenant d'amitié pour sa fille, une jeune paumée new-yorkaise.

Le film de Rachid Bouchareb, plein de tendresse pour ces personnages dont il évoque la vie, les inquiétudes quotidiennes et les espoirs - comme la femme du neveu d'Alloune qui apprend à lire en cachette et refuse de continuer à vivre comme au village -, met en lumière les relations difficiles, teintées de racisme parfois, d'incompréhension et de mépris souvent, entre la population afro-américaine et les nouveaux immigrants venus d'Afrique.

Le mérite de ce film n'est pas tant d'évoquer l'esclavage, qui sert de toile de fond à cette belle histoire, que de nous faire partager les relations conflictuelles entre deux communautés noires - si semblables mais si différentes culturellement - dont les personnages sont particulièrement vivants et attachants.