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- Lutte ouvrière n°1897
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Dans les entreprises
Peugeot - Sochaux : Le patron responsable, coupable... et relaxé !
Décembre 2002 à l'atelier Ferrage de Peugeot Sochaux: renversé par un fenwick alors qu'il empruntait un passage piéton, un ouvrier de 58 ans est traîné sous les fourches de l'engin sur 5 mètres avant que l'ouvrier cariste ne s'en aperçoive et ne s'arrête! C'est un calvaire pour la victime: perte d'un oeil, bras droit arraché, thorax enfoncé, blessure à l'abdomen.
Deux mois auparavant, dans un tract intitulé "Un parcours du combattant dans un coupe-gorge", les militants CGT de l'atelier avaient précisément dénoncé les conditions invraisemblables de circulation dans ce secteur: "Va-t-il falloir recevoir ou donner des coups de fourches selon qu'on est piéton ou cariste pour que la direction se remue?".
Comme toujours quand la direction implante un nouveau secteur, on installe des machines, et seulement après on essaie de caser les locaux sociaux, sans se préoccuper du trajet entre vestiaires et postes de travail avec passage au milieu du trafic d'engins.
Au lendemain de l'accident, la direction de l'atelier déclarait qu'elle attendait la semaine 52 -après Noël- pour réaliser les travaux de sécurisation! La production avant, la sécurité après.
Sur plainte de la victime, l'affaire est passée il y a un mois au tribunal de Montbéliard. Le procureur mettait précisément en cause la direction de l'entreprise en s'appuyant sur un avis du CHSCT, un rapport de la direction départementale du travail, ainsi que le tract de la CGT. Tous ces documents concluaient dans le même sens. Mais il n'empêche que le procureur faisait déjà pencher la balance dans un certain sens puisqu'il demandait quatre mois de prison avec sursis pour l'ouvrier cariste et 150000 euros d'amende pour l'entreprise. Bref, prison pour l'ouvrier et amende pour le patron. Enfin, le jugement a été rendu vendredi 3 décembre: l'ouvrier cariste est condamné à trois mois avec sursis et 350 euros d'amende... et Peugeot est relaxé! ! !
L'avocat du patron avait osé affirmer dans sa plaidoirie que "la sécurité, l'organisation ont toujours été respectées chez Peugeot Sochaux". La presse locale conclut prudemment que "ce point de vue est apparemment partagé par les magistrats". Apparemment, les journalistes eux-mêmes stupéfaits du jugement n'osent pas en dire plus.
En résumé, deux ouvriers sont victimes et payent cher. De son côté, Peugeot sort blanchi de cette affaire. Et le pire, si l'on peut dire, c'est que ce jugement constitue désormais une menace pour tous les conducteurs d'engins, et plus généralement pour tous les travailleurs responsables de machines ou d'installations à risques.
Apparemment il n'y a pas eu un magistrat pour aller dans l'atelier se rendre compte de la réalité du terrain. Dans les ateliers, les ouvriers sont choqués par ce jugement et affirment, eux, leur solidarité avec les deux ouvriers victimes.