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- Lutte ouvrière n°2139
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Editorial
Pendant les vacances, le massacre des emplois continue
Bien que nous soyons entrés au coeur de la période des congés d'été, la rubrique sociale, au chapitre fermetures d'entreprises, plans de suppressions d'emplois, et luttes des travailleurs menacés, reste bien alimentée.
Une cinquantaine de travailleurs de l'usine Saint-Gobain-Quartz, située à Nemours, occupent depuis une semaine leur entreprise menacée par un plan de 46 suppressions d'emplois. Saint-Gobain-Quartz est une filiale du groupe Saint-Gobain, qui emploie plus de 200 000 personnes dans le monde, mais qui multiplie dans tous les secteurs des plans de licenciements. Ses bénéfices ont certes été en net recul en 2008 par rapport aux années précédentes, mais cela n'empêchait pas Le Figaro du 24 juillet de titrer « Saint-Gobain : bénéfice qui chute mais titre qui s'envole », car pour ceux qui spéculent en Bourse les licenciements de travailleurs sont toujours vus comme une bonne opération, annonçant de fructueux profits pour l'avenir.
De son côté la société Servisair Cargo, présente en particulier sur les aéroports de Roissy et d'Orly, est visée par une liquidation judiciaire, qui réduirait ses 337 salariés au chômage. Servisair a peut-être des difficultés financières, mais c'est une filiale du groupe Derichebourg, qui emploie plus de 50 000 salariés. Ce groupe, prestataire de service en tous genres, a subdivisé ses activités entre de multiples filiales, et n'hésite pas à en fermer une quand elle n'est plus assez rentable, en en jetant sans scrupule les salariés à la rue. Mais cela ne l'empêche évidemment pas de prospérer : son chiffre d'affaires a triplé entre 2004 et 2008, et ses bénéfices augmenté de 50 % entre 2007 et 2008.
À Châtellerault, les salariés de New Fabris, entreprise sous-traitante de Peugeot et de Renault, mise en liquidation judiciaire parce que ses donneurs d'ordre ont cessé leurs commandes, continuent la lutte. Ils menacent de détruire les stocks de pièces détachées et les machines s'ils n'obtiennent pas 30 000 euros d'indemnités de licenciement.
Le ministre chargé de l'Industrie, Estrosi, qui ne s'est jamais indigné devant les chantages patronaux visant à obtenir des salariés plus de travail pour moins de paie, a vu dans cette démarche un chantage inacceptable. Et il a doctement expliqué que les primes de licenciement ne constituaient pas une solution, car une fois qu'elles étaient mangées, les travailleurs n'étaient pas plus avancés. On ne sait pas pourquoi il n'a pas fait le même raisonnement sur les parachutes dorés des PDG. Mais il est vrai qu'ils permettent de bien vivre bien plus longtemps !
Alors, c'est vrai que les indemnités de licenciement, même quand elles sont importantes, ne constituent pas la solution idéale. Ce que la crise rend nécessaire, c'est l'interdiction totale des licenciements, le partage du travail entre tous sans diminution de salaire. Ce devrait être l'objectif de toutes les confédérations syndicales, si elles voulaient vraiment défendre les intérêts des travailleurs. Mais loin de proposer un plan de mobilisation de l'ensemble du monde du travail pour contraindre le patronat à supporter le poids de la crise dont il est responsable, elles se contentent de journées d'action éparses, en expliquant que c'est de la négociation autour du tapis vert que pourront sortir des solutions favorables aux travailleurs. Comme si c'était l'éloquence des leaders syndicalistes qui allait amener patronat et gouvernement à faire des concessions.
C'est une lutte d'ensemble de la classe des travailleurs qui serait nécessaire. Mais tant qu'on ne s'est pas engagé dans cette voie, les travailleurs aujourd'hui menacés d'être jetés à la rue, qui se battent dans leur entreprise, ont mille fois raison de vendre leur peau le plus cher possible. Et chacune de ces actions, même si elle ne rencontre qu'un succès partiel, peut redonner confiance aux plus démoralisés, et préparer la lutte générale de demain.
Éditorial des bulletins d'entreprise du 27 juillet