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Dans le monde
Argentine : une disparition qui ne passe pas
Le 1er septembre, l’Argentine a été marquée par une manifestation monstre pour protester contre la disparition d’un artisan de 28 ans, Santiago Maldonado, arrêté par la gendarmerie le 1er août dernier et introuvable depuis.
Lorsqu’il a disparu, il était en Patagonie. Or, depuis deux ans, cette région est marquée par les protestations d’indiens Mapuche qui dénoncent l’accaparement d’une grande partie de leurs terres par la multinationale Bennetton. Un dirigeant de la protestation, Facundo Jones Huala, est en prison et la répression des gendarmes est très lourde : saccage des biens des Indiens et tirs de balles en plastique ou en plomb contre les manifestants.
Santiago Maldonado, qui n’est pas un militant mais qui n’est pas indifférent au sort des Indiens, a pu participer à une manifestation de soutien où il a été arrêté. Un témoin l’a vu monter dans une camionnette de la gendarmerie. Depuis, il a disparu.
Or en Argentine, depuis la dictature militaire (1976-1983), qui a entraîné la « disparition », c’est-à-dire la mort, de 30 000 opposants, c’est un sujet très sensible. Le 11 août, il y a eu une première manifestation importante à Buenos Aires pour exiger « l’apparition de Santiago en vie », comme disaient les Mères de la place de Mai au temps de la dictature. Un tel sujet mobilise toujours de nombreuses personnes qui ne manifestent pas habituellement.
Face à cela, le gouvernement de droite, aux affaires depuis l’accession à la présidence de Mauricio Macri il y a deux ans, a allumé des pare-feu. La ministre de l’Intérieur a dénoncé un prétendu terrorisme des Indiens Mapuche, justifiant les répressions les plus inavouables. Puis les médias, presque tous à la botte du gouvernement, ont diffusé une vidéo d’un magasin pour prétendre que Santiago était vivant. Manque de chance, le client filmé a osé faire savoir qu’il n’était pas Santiago. Depuis, pour la forme, le gouvernement propose une forte récompense à qui donnera des nouvelles du disparu. Mais cela ne trompe pas grand monde.
Depuis la fin de la dictature, il y a eu 210 disparitions causées par les forces de répression. La plus connue est celle de Julio Lopez, une victime de la dictature ayant échappé à la mort et venu témoigner, il y a dix ans, contre un tortionnaire, et qui avait « disparu » le lendemain.
Lopez a disparu sous le gouvernement péroniste des Kirchner, Maldonado sous la droite de Macri, les deux équipes politiques qui se succèdent pour servir la bourgeoisie. Et bien sûr, pour ces gouvernants, il est hors de question de mettre en cause les agissements des bandes armées du capital.