Banques : Les salariés veulent défendre leur convention collective03/12/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/12/une-1638.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Banques : Les salariés veulent défendre leur convention collective

Les 30 novembre, les employés de banque ont fait grève et manifesté massivement contre la remise en cause de leur convention collective.

C'est en février 1998 que, sous prétexte de la loi sur les 35 heures, les banquiers (réunis dans l'Association Française des Banques) avaient dénoncé unilatéralement cette convention. Elle existait dans cette branche depuis 1952 et avait fait l'objet de multiples avenants. Si les effectifs de ces banques ont diminué ces dernières années, ce sont encore plus de deux cent mille salariés qui sont concernés.

Pendant des mois, l'AFB a fait semblant de négocier avec les fédérations syndicales. Ce n'est qu'en juin 1999 qu'elle a remis un projet de nouvelle convention, sachant que la date d'expiration de l'ancienne convention est le 31 décembre 1999.

Un projet inacceptable

Ce projet était en recul sur tous les sujets (salaire, congés maladie, maternité, droit disciplinaire, licenciement, etc.) par rapport au texte actuel. Dans un premier temps, les cinq fédérations syndicales (CGT, CFDT, FO, CFTC et SNB-CGC) n'avaient prévu éventuellement le recours à la grève que pour la fin de cette année. Cela est apparu bien lointain et beaucoup trop tardif, même si certains pensaient que le passage à l'an 2000 pouvait aussi être une bonne occasion de faire grève. En fait, beaucoup d'employés prennent quelques jours de congés dans cette période. Alors que, de leur côté, les banquiers ont appâté le personnel dont ils ont besoin pour le passage à l'an 2000 en annonçant des primes pour ces journées (au Crédit Lyonnais par exemple, 1 500 F pour le 24 décembre, 2 500 F pour le 2 janvier et 3 000 F pour le 25 décembre ou le 1er janvier). Pour certaines occasions, les banquiers ont de l'argent !

L'idée de la grève fait son chemin

À l'occasion des premiers mouvements localisés, banque par banque, autour du 26 octobre, dans le personnel et dans tous les syndicats de base, des voix se sont élevées pour demander que soit décidée une grève, de toutes les banques, le même jour, sans attendre la fin de l'année.

Finalement, cette journée a été fixée au mardi 30 novembre avec manifestation nationale à Paris.

Au fur et à mesure, ces quinze derniers jours, l'intérêt du personnel s'est accru. Les passages en commun des délégués dans les services et agences faisaient discuter. Le tract des cinq fédérations syndicales faisant le bilan comparatif du projet, de l'actuelle convention et du Code du travail était recherché. Au bureau, au réfectoire, dans les stages, dans les transports, les employés discutaient plus volontiers de la grève. Serons-nous assez nombreux, n'est-ce pas trop tard, est-ce que la signature d'un seul syndicat peut suffire aux banquiers ? Mais peu à peu le fatalisme reculait.

La direction fait le forcing

Au Crédit Lyonnais, la direction s'est mise à organiser des réunions de personnel sur le temps de travail, parfois sur l'heure du déjeuner. Cela était nouveau et, à leur façon, ces réunions en principe pro-AFB ont en fait contribué à démontrer à tous l'importance de l'enjeu. Ici et là, des responsables, pas toujours très convaincus, ni très au courant, faisaient de " l'information " sur le projet patronal. Mais prouver que le nouveau texte est meilleur que l'ancien, c'était mission réellement impossible. Beaucoup renvoyaient le personnel au numéro vert mis en place par les banquiers pour avoir réponse à leurs questions. On vit aussi la direction se mettre à l'affichage sauvage sur les murs des bureaux pour proposer le numéro vert de l'AFB.

Les patrons dépassent les bornes

L'AFB nous a aussi abreuvés de tracts " Demain, la banque " - sur papier glacé - dont pas moins de huit numéros tentaient de justifier ce " nouveau projet " au nom de la modernité. Mais est-ce moderne, à quelques semaines de l'an 2000, d'annoncer la suppression de la petite augmentation annuelle due à l'ancienneté, de précariser un peu plus le salaire en l'individualisant selon la cote d'amour et les " prix du marché ", d'introduire un nouveau licenciement pour motif personnel, de réduire la durée des congés maternité, de gratter un ou deux jours par-ci, par-là, sur les congés pour besoins familiaux ou pour la garde d'enfants malades ? Ce sont autant de reculs, autant de retours en arrière. Et cela dans une profession où toutes les banques annoncent des résultats en hausse de 25 à 200 % pour les neuf premiers mois de l'année !

La résistance s'organise

La rapacité des banquiers qui en veulent toujours plus et voudraient faire tomber les derniers remparts, un tant soit peu protecteurs, pour renvoyer les problèmes au niveau de chaque entreprise, et nous livrer pieds et poings liés à la " conjoncture " - traduisez : aux intérêts des actionnaires des banques - apparaissent de plus en plus insupportables.

Des salariés, jeunes ou anciens, qui n'avaient jamais fait grève ont franchi le pas et décidé que, cette fois-ci, il fallait réagir. Ils ont fait grève.

Venus des services et des agences, c'est un cortège de 1 500 grévistes qui, parti du Siège central du Crédit Lyonnais, a rejoint la manifestation à Opéra, où étaient rassemblés les collègues de province et des autres banques. C'est à environ 20 000 que nous avons défilé dans les rues de Paris aux cris de " Convention saccagée, salaires bradés, ça ne peut plus durer, ça va péter ", " Non, non, non à la spéculation ; Oui, oui, oui à notre convention ", " A Paris, en province, les employés mobilisés feront céder les banquiers ". Des manifestations ont eu lieu aussi à Toulouse, Marseille, Toulon, Nice, Bordeaux, Strasbourg.

Au Crédit Lyonnais, la direction a reconnu officiellement une participation à la grève variant de 10 % à plus de 50 % suivant les secteurs. Ce sont là des chiffres très importants.

Un peu partout, les directions ont dû fermer des agences par manque de personnel. Par exemple, 34 sur 49 en Midi-Pyrénées. Dans cette région, le personnel réuni à la Bourse du Travail de Toulouse a décidé de reconduire la grève pour le 1er décembre.

Des réunions de négociations sont prévues entre les fédérations syndicales et le patronat bancaire, les 3, 8, 13 et 17 décembre. Ce sont autant d'occasions pour les prochaines grèves. Ce qui est à l'ordre du jour, c'est d'étendre la grève et d'envisager sa reconduction pour obtenir satisfaction.

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