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Leur société
Profits en flèche et salaires en rade
Depuis l'annonce de l'indice des prix de septembre et d'un taux d'inflation de 2, 2 % sur douze mois, les journalistes agitent la menace du retour de l'inflation : il s'agit de la plus forte hausse depuis 1996. Cette augmentation, pour l'instant limitée, ne rend certainement pas compte de la perte réelle de pouvoir d'achat qu'ont connue des millions de salariés du fait du chômage, d'emplois retrouvés à des salaires inférieurs ou de la baisse considérable des salaires d'embauche. Mais une telle distorsion entre les chiffres et la réalité est monnaie courante.
Car même pour ceux qui ont gardé leur emploi, le pouvoir d'achat s'est réduit d'année en année, du fait, entre autres, du blocage des salaires, décrété par le gouvernement de gauche en 1982. D'après la CGT, le salaire des fonctionnaires, par exemple, a ainsi perdu 10 % de sa valeur. Les journées de grève à la SNCF et à EDF, mais aussi d'autres grèves qui se produisent pour des augmentations de salaire, révèlent le mécontentement des travailleurs. Pour l'instant, ces réactions restent limitées, sans que les syndicats leur ouvrent des perspectives claires. Il n'empêche qu'aujourd'hui où le gouvernement et les représentants du patronat ne cessent de répéter que la crise est terminée, que la croissance est de retour, tous les travailleurs pourraient se retrouver sur cet objectif d'augmentation des salaires.
Car non seulement le gel des salaires n'a pas été levé, mais le gouvernement a aidé le patronat à le prolonger au travers des accords sur les 35 heures Selon une étude du ministère de l'Emploi, 47 % des salariés concernés par un accord dans le cadre de la loi Aubry ont leur salaire bloqué pour 26 mois en moyenne et 28 % se voient imposer une clause de modération salariale sur 29 mois. Pendant ce temps, les grandes entreprises engrangent des profits records. Au premier semestre 2000, les vingt premiers groupes industriels et commerciaux ont réalisé autant de bénéfices que pendant toute l'année 1999, soit 86,9 milliards de francs.
Il faut toute la mauvaise foi d'un homme politique de la bourgeoisie pour prier les salariés de bien vouloir prendre leur mal en patience comme l'a fait Jospin qui a évoqué le risque que des augmentations de salaires puissent relancer l'inflation. En réalité, pour augmenter les salaires, il suffirait de prélever dans la masse énorme des profits. Car si quelque chose doit être revu à la baisse, ce sont bien les profits des entreprises. Et si les travailleurs l'imposaient, en même temps qu'ils imposeraient leur contrôle, cela n'aurait pas d'effet inflationniste, au contraire de l'épouvantail que l'on agite pour les inciter à la modération.