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Leur société
Déchets nucléaires : Une méfiance bien compréhensible
Trois ans après la décision d'arrêter les transports de déchets radioactifs entre la France et l'Allemagne, l'expédition d'un premier train entre l'usine de retraitement de La Hague, en France, et le site de stockage de Gorleben en Allemagne n'est pas passée inaperçue.
Si les milieux antinucléaires et écologistes français ne se sont guère opposés à ce rapatriement des déchets allemands, en Allemagne, en revanche, plus de 10 000 manifestants ont multiplié les initiatives pour retarder la progression du train. En dépit d'un très imposant dispositif policier, ce dernier a parfois mis plus d'une heure et demie pour parcourir une dizaine de kilomètres.
Car si les leaders des Verts allemands ont mis une sourdine à leur opposition au nucléaire depuis deux ans qu'ils ont fait leur entrée dans le gouvernement Schröder, la base du mouvement antinucléaire n'a pas désarmé. Et elle veut pousser à l'arrêt des centrales nucléaires en bloquant les transports de déchets.
En effet, chaque année, les centrales doivent renouveler le tiers de leur combustible. L'évacuation et le retraitement du combustible usé sont donc un impératif, et non des moindres. Du fait de l'arrêt des convois entre la France et l'Allemagne, depuis 1997, plus de mille tonnes de déchets radioactifs encombrent les centrales allemandes, qui sont au bord de l'asphyxie.
Le problème, c'est que même après les opérations de retraitement menées à La Hague, il reste des déchets hautement radioactifs que l'Allemagne s'est engagée à récupérer. Or, de l'aveu même des autorités, aucun site n'a été aménagé à cet effet ; celui de Gorleben -une ancienne mine de sel- n'étant présenté que comme une solution provisoire.
A juste titre, les antinucléaires comme les habitants de la région de Gorleben s'y opposent, non seulement parce qu'ils n'ont aucune garantie que le stockage de centaines de tonnes de déchets sous leurs pieds ne soit que provisoire, ensuite parce qu'ils n'ont aucune confiance dans les affirmations des défenseurs de l'énergie nucléaire quant au caractère inoffensif de ces déchets pour l'environnement.
Certes, rien ne dit que dans les faits l'énergie nucléaire telle qu'elle est utilisée aujourd'hui soit finalement plus nocive que ne l'a été l'utilisation d'autres sources d'énergie dans le passé, telles que le charbon ou le pétrole. Mais on ne peut faire confiance ni aux industriels concernés ni aux gouvernants pour garantir que le respect des populations et de l'environnement constituera une priorité dans les choix qui seront faits.
Dans cette société capitaliste, où la recherche du profit prime sur tout autre considération, il y a tout lieu d'être méfiant. D'autant que le passé atteste de la conduite irresponsable et dangereuse de ceux qui ont le pouvoir de décision ; il n'est que de voir les dégâts occasionnés dans les anciennes régions charbonnières où, sans parler du triste spectacle des terrils, les effondrements de terrain liés aux kilomètres de galeries que plus personne n'entretient sont fréquents.
Il n'y a que dans une société débarrassée de la loi du profit que l'on pourra avoir la garantie que les choix en matière énergétique, comme tous les choix concernant l'ensemble de la population, seront pris avec toutes les précautions qui s'imposent pour le respect de l'humanité et de l'environnement.