Impôts : Où est passée la prime pour l'emploi ?30/03/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/03/une-1707.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Impôts : Où est passée la prime pour l'emploi ?

Sur le formulaire de déclaration de revenus que les contribuables ont à remplir ces jours-ci, la fameuse prime pour l'emploi est introuvable. Alors qu'elle est censée concerner un contribuable sur trois, aucune mention dans le formulaire de Bercy n'y fait référence. En particulier, nulle part il n'est indiqué que pour toucher cette prime il faut remplir une zone intitulée "renseignements complémentaires sur les revenus d'activité".

Les salariés, et surtout les non-imposables, qui font habituellement leur déclaration en remplissant les quelques cases usuelles, n'y verront que du feu et n'auront pas droit à la prime. De toute façon, il n'y a aucun moyen, sur la déclaration elle-même, de savoir si on est bénéficiaire ou non de la prime.

D'après le Syndicat National Unifié des Impôts (SNUI), 80 à 90 % des premières déclarations renvoyées étaient incomplètes et les personnes concernées risquent de ne pas toucher le crédit d'impôt. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a reculé au 2 avril la date limite d'envoi des déclarations de revenus et s'est fendu d'une "communication" dans la presse concernant la prime pour l'emploi. Il explique maintenant : "Remplissez les deux cases dans tous les cas, on fera le calcul pour vous" ! Il paraît que la dernière semaine, les demandes de renseignements se sont fortement accrues, ce qui est interprété comme "un très bon signe" par Bercy car cela montrerait que "de plus en plus de contribuables sont sensibilisés." En fait, d'après le SNUI, 50 % des déclarations ont toujours des erreurs.

L'affaire montre en tout cas surtout le mépris et le dédain des hauts fonctionnaires du ministère pour une mesure qui exceptionnellement concerne les contribuables parmi les moins fortunés.

Prime très sélective

La prime pour l'emploi, adoptée à l'Assemblée le 1er février 2001, sera attribuée en septembre prochain aux personnes ayant exercé en 2000 une activité professionnelle salariée et disposant de revenus compris entre 20 575 F et 96 016 F, soit dix millions de personnes. Elle est très complexe, à tel point que la notice d'explication mise en ligne sur le site Internet du ministère des Finances a été remplacée car elle comportait des exemples erronés !

Cette prime bien modeste peut être au maximum de 1 900 F pour une personne. Elle ne concerne pas toute la population pauvre, loin de là. En effet, comme son nom l'indique, elle ne concerne que ceux qui ont un emploi, un "revenu d'activité". Ni les chômeurs ni les retraités ne sont concernés. Elle est maximale pour un smicard à temps plein (1 900 F de prime) mais est dégressive au-dessus du SMIC, et en dessous jusqu'à 0,3 SMIC.

Autre injustice, les travailleurs à temps partiel sont pénalisés puisque le calcul de la prime s'effectue en tenant compte, non de ce qu'ils ont réellement touché, mais de ce qu'ils auraient touché en travaillant à plein temps.

Ainsi une caissière à temps plein ayant gagné 70 000 F de salaire net imposable dans l'année touchera une prime pour l'emploi de 1 431,00 F Mais si elle a gagné 35 000 F en travaillant à mi-temps (un horaire généralement imposé par les patrons), 800 heures seulement, elle n'aura droit qu'à 396 F de prime ! Ainsi les salariés à temps partiel sont doublement pénalisés, leurs salaires diminués et la prime aussi !

D'après le ministère des Finances, le principe de cette mesure est d'inciter les chômeurs à retrouver du travail en ayant un "différentiel" de revenus, en particulier entre le RMI et un emploi salarié. Tout d'abord cela revient à considérer que les chômeurs se contentent de leur situation et que là serait la cause du chômage. Mais est-ce que les entreprises publiques et privées qui suppriment des emplois au lieu d'en créer n'en sont pas plus responsables que les ouvriers licenciés ?

Et puis s'il fallait augmenter ce "différentiel", pourquoi ne pas avoir augmenté les salaires, en particulier le SMIC ? Voilà qui aurait été simple et facile à appliquer. Mais cette solution aurait eu pour le gouvernement le tort de mettre à contribution les patrons. Alors il préfère donner une aumône aux "bons pauvres" qui travaillent à temps plein et faire la morale aux chômeurs et aux rmistes qui selon lui ne la méritent pas.

Pour les plus riches par contre, pas de problème : le gouvernement les soigne. En effet, sur les 120 milliards de diminutions d'impôts prévus sur trois ans, les trois quarts concernent la fraction la plus riche, en particulier les tranches supérieures de l'impôt sur le revenu. Par exemple, le golden boy déclarant 450 000 F au fisc paye actuellement 112 047 F. Il ne payera plus que 105 451 F soit un gain de 6 600 F par an.

Les détenteurs de stock-options, bénéficiaires de dividendes, plus-values de toutes sortes, tous les parasites qui font de l'argent en dormant, vont faire de nouvelles économies d'impôt sans se fouler. Avec Fabius et Jospin aux commandes, ils peuvent continuer à dormir sur les deux oreilles.

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