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- Lutte ouvrière n°1709
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Editorial
Interdire les licenciements sous peine de réquisition !
Danone, Marks et Spencer, les cheminots, les sages-femmes : par-delà les différences entre le public et le privé, les travailleurs sont victimes d'une même offensive à travers laquelle le patronat vise avec l'aide du gouvernement à augmenter sa part au détriment du monde du travail.
Une campagne de presse s'en est prise aux cheminots sur le thème " une petite minorité prend la population en otage ". Mais les conseils d'administration qui, chez Danone ou Marks et Spencer, ont décidé des suppressions d'emplois, catastrophiques pour les victimes et leurs familles, ruineuses pour leurs villes, ne sont-ils pas infiniment plus minoritaires ?
Les travailleurs de la SNCF qui n'acceptent pas que leurs salaires soient freinés alors que leur travail augmente et que la direction n'embauche pas, et qui refusent l'abandon du service public au profit de la rentabilité commerciale, en vue des privatisations futures, ont raison de protester. Ils doivent avoir le soutien de tous les travailleurs.
Chirac ose proposer de légiférer pour imposer un service minimum en cas de grève dans le service public. Que ne propose-t-il de légiférer contre les entreprises qui affichent des bénéfices scandaleux et licencient quand même ? Que ne s'oppose-t-il à la privatisation qui mettra fin au service public alors qu'augmenter les effectifs ne peut que l'améliorer ?
Ce ne sont pas les grévistes qui font du mal à la SNCF mais l'État qui, pour pouvoir mettre plus d'argent à la disposition du patronat, fait des économies sur le matériel comme sur le personnel, à la SNCF comme dans les services publics de la Santé ou de l'Éducation nationale.
Il y a de quoi être révolté par l'attitude de Danone et de Marks et Spencer qui ferment plusieurs établissements alors que les deux trusts sont riches grâce à ceux à qui ils portent des coups et dont l'un, Danone, a réalisé cette année encore des bénéfices considérables.
Les travailleurs de Danone ont appelé à boycotter les produits de l'entreprise. Il faut que cet appel rencontre l'appui de l'opinion. Même si cela ne se traduit pas par une diminution du chiffre d'affaires de ce trust, cela jettera au moins le discrédit sur son nom et réduira à néant l'impact de ses publicités qui coûtent des millions.
Par contre, les hommes politiques qui se précipitent sur ce boycott pour faire oublier qu'ils ne font rien pour empêcher les grandes entreprises de mépriser le sort de leurs travailleurs et des villes entières, sont de parfaits hypocrites.
Cela fait des années, notamment lors de la campagne présidentielle de 1995, que nous répétons qu'il est indispensable de légiférer pour sanctionner, en particulier par la réquisition, les entreprises qui affichent des bénéfices énormes et qui annoncent quand même des licenciements. Pire, Danone va continuer à bénéficier de milliards de dégrèvements sous prétexte qu'il a signé un accord sur les 35 heures.
Lorsque les conseillers régionaux de Lutte Ouvrière ont demandé que la subvention accordée à Danone pour une unité de recherches soit supprimée, le Conseil régional d'Ile-de-France a refusé leur proposition. Aujourd'hui, le socialiste Huchon, son président, sous la pression de l'opinion, en vient à bloquer cette subvention, et c'est heureux.
Eh bien, le gouvernement de son côté doit immédiatement proposer aux députés de la majorité dite de gauche une loi permettant de sanctionner sur leurs bénéfices, sur leurs biens qui pourraient être saisis, des comportements tels que celui de Danone ou de Marks et Spencer.
Les travailleurs n'accepteront pas éternellement que les trusts qui dominent l'économie puissent les pousser au chômage pour plaire à une poignée d'actionnaires, en foulant aux pieds les intérêts les plus élémentaires de la société. Ils finiront pas imposer les mesures indispensables.
Lutte Ouvrière appelle à soutenir toutes les actions de protestation contre Danone et Marks et Spencer et à participer nombreux à la manifestation organisée à Calais le 21 avril.