«Ce qui se passe en Afrique nous concerne d'autant plus qu'une bonne partie de ce continent a constitué dans le passé et constitue encore aujourd'hui, dans une large mesure, la chasse gardée de notre impérialisme, l'impérialisme français.

Combien de grands trusts français, à commencer par le plus puissant d'entre eux, TotalFinaElf, y puisent l'essentiel de leurs profits ? Combien de fortunes, grandes et petites, s'y sont édifiées pour être rapatriées ici en France ? Combien de grandes entreprises de travaux publics et d'armement émargent aux budgets des Etats africains, alimentés par de l'argent prélevé sur des masses qui crèvent de misère ?

(...) Au-delà du cas particulier de l'Angola, ils sont de plus en plus nombreux, les pays d'Afrique, du Sierra Leone au Congo, en passant par le Liberia ou le Zaïre, où l'impérialisme a trouvé les moyens de tirer du profit des guerres civiles ou ethniques elles-mêmes, en fournissant des armes aux uns et aux autres, en mettant la main sur les ressources, les métaux rares, les diamants, par l'intermédiaire de chefs de bandes armées.

Et, ce faisant, il aggrave les guerres civiles et ethniques, il les prolonge, en fait une ressource permanente pour lui-même et une catastrophe permanente pour la population de ces pays, pour qui la survie elle-même tient du miracle quotidien.

Alors oui, il ne faut pas chercher ailleurs que dans la domination impérialiste, et dans la pauvreté qui en résulte pour les populations de la majorité des pays de la planète, les causes des affrontements ethniques, de la montée des intégrismes ou des conflits entre seigneurs de guerre.

C'est cette domination impérialiste sur le monde qui est aussi la principale responsable de la situation au Moyen-Orient.

Pour protéger cette zone indispensable à l'économie impérialiste mondiale en raison de sa position stratégique et en raison de ses ressources pétrolières, les grandes puissances ont fait d'Israël le gendarme contre les peuples arabes de la région. En chargeant l'État d'Israël de cette besogne, elles ont contribué à couper le peuple d'Israël des peuples arabes en général et du peuple palestinien en particulier. Elles soutiennent politiquement et financièrement, elles arment l'État d'Israël pour que celui-ci ait les moyens d'opprimer le peuple palestinien.

L'Intifada, révolte du peuple palestinien, montre cependant que des relations basées sur l'oppression entre ces deux peuples, qui vivent ensemble sur un même territoire, ne peuvent pas être durables. Aujourd'hui, ce n'est pas seulement le peuple palestinien opprimé mais aussi le peuple israélien qui paie le prix de la politique impérialiste.

On ne peut qu'éprouver un sentiment d'horreur devant l'attentat-suicide qui a fait une vingtaine de morts en Israël, des jeunes, dans une discothèque. Les attentats aveugles sont inacceptables, même quand ceux qui les commettent y laissent leur peau. Mais ils ne sont certainement pas plus inacceptables que les bombardements à partir d'avions ou d'hélicoptères sur des objectifs situés dans les quartiers populaires, hauts faits d'armes de l'armée israélienne. Et quel doit être le désespoir d'un peuple pour susciter des vocations aux attentats-suicides !

Les dirigeants des grandes puissances impérialistes sont d'autant moins capables de régler les problèmes du Moyen-Orient que, pour le faire, il faudrait non seulement mettre fin à l'oppression mais aussi à la misère qui est le lot de la majorité pauvre de la population palestinienne.

Le seul avenir humainement acceptable pour les peuples de la région, c'est la coexistence fraternelle sur la base de l'égalité entre les deux peuples. Mais cela ne pourra pas se réaliser tant que la majorité d'un des deux peuples est condamnée à la misère. Il ne suffit pas d'intituler «territoire autonome» ce camp de concentration pour pauvres qu'est la bande de Gaza pour arrêter la révolte. Il ne suffit pas non plus de donner à une police palestinienne le droit d'opprimer son propre peuple, car les policiers eux-mêmes finissent par être entraînés dans la révolte. Une révolte dont la cause est l'oppression et l'humiliation d'un peuple mais aussi sa pauvreté.

Alors, ce que j'espère pour l'avenir, c'est qu'au lieu de suivre des dirigeants qui les poussent les uns contre les autres, les exploités des deux peuples trouvent le chemin de l'unité pour se battre ensemble contre les véritables causes de l'exploitation.

Il en est de même plus près de nous, dans un pays dont le destin a été si longtemps lié à celui de la France et qui lui reste encore lié par une multitude de liens aujourd'hui : l'Algérie.

Car, parmi les causes de la révolte qui secoue la Kabylie, il n'y a certainement pas seulement les revendications concernant le droit à l'utilisation de la langue berbère ou la culture kabyle, il y a aussi le chômage, la pauvreté, une vie sans avenir pour la jeunesse ; il y a la dictature militaire à peine déguisée pour protéger une petite couche de dignitaires qui s'enrichissent au détriment de la majorité de la population.

Mais comment ne pas se souvenir que, si l'Algérie est pauvre, c'est qu'elle a subi 120 ans de domination coloniale française, qu'elle a subi une guerre coloniale atroce qui l'a saignée économiquement et humainement ? Guerre menée sous la responsabilité politique notamment de Guy Mollet, de Mitterrand, les parents politiques des dirigeants socialistes actuels.

Alors, je tiens à témoigner ma solidarité envers le peuple algérien qui subit tout à la fois la dictature militaire et la barbarie intégriste et, par-dessus tout, la dictature de la pauvreté, dont notre bourgeoisie porte la responsabilité essentielle.»