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Allemagne - Élections à Berlin : La progression du PDS
Dimanche 19 octobre ont eu lieu les élections à la Chambre des députés de Berlin, qui tient lieu d'assemblée à la fois municipale et régionale.
Il s'agissait d'élections anticipées, à peine deux ans après les précédentes. Un large scandale immobilier a éclaté en février, dans lequel était impliqué le parti de droite, l'Union Chrétienne-Démocrate (CDU) qui dirigeait la capitale allemande jusque-là. A la suite de créances douteuses dans l'immobilier, la ville avait dû injecter treize milliards de francs dans la banque Bankgesellschaft Berlin (contrôlée à 56 % par la municipalité), afin de lui éviter la faillite. On avait appris aussi que des responsables locaux de la CDU avaient touché des pots-de-vin à l'occasion d'un marché de rénovation des HLM.
La CDU gouvernait alors la ville dans le cadre d'une "grande coalition" avec le Parti Social-Démocrate (SPD). Ce dernier a préféré rompre pour ne pas porter le chapeau du discrédit, ce qui a conduit à ces élections anticipées.
C'est le SPD qui l'a emporté avec 29,7 % des voix, la CDU avec 23, 7 % réalise son plus mauvais résultat depuis 1948 et recule de 17,1 points !
L'autre résultat notable de ce scrutin est la nouvelle progression (de 4,9 %) du Parti du Socialisme Démocratique (PDS), l'héritier de l'ancien parti stalinien est-allemand qui présentait comme candidat à la mairie Gregor Gysi. Il atteint 22,6 % sur l'ensemble de la ville et 47,6 % dans l'ancien Berlin-Est où il est désormais le premier parti... pratiquement douze ans après la chute du Mur. Même à l'Ouest, il enregistre une progression dépassant, avec 6,9 %, pour la première fois, la barre des 5 %.
Contrairement à ce que serinent bien des commentateurs de la presse bourgeoise, ces résultats dépassent largement celui des votes des anciens privilégiés du régime de la RDA. Ils sont l'expression d'un certain mécontentement populaire. Dans la première circonscription de Marzahn-Hellersdorf, qui est presque à elle seule une immense cité HLM, le PDS obtient par exemple 56, 1 %.
Pour les classes populaires, il y a en effet de quoi être mécontent. Le taux de chômage s'élève aujourd'hui à Berlin à 16 %, contre 9,2 % dans l'ensemble du pays. Dans la partie est de la ville, les emplois industriels ont fondu de 200 000 en 1990 à 40 000 aujourd'hui. Onze ans après la réunification, la ville cumule une dette de 288 milliards de francs. Car si Berlin-Ouest a été, pendant des années, un îlot de prospérité maintenu à coup de subventions face à la RDA, aujourd'hui l'Etat fédéral ne veut plus injecter un mark et le fardeau retombe sur la population.
Pourtant, de l'argent, il en a coulé à flots depuis dix ans : par exemple pour assurer le transfert de tout le gouvernement de Bonn à Berlin, payer des primes importantes aux hauts fonctionnaires qui, au début, ne voulaient pas quitter leur cocon au bord du Rhin, implanter le nouveau quartier gouvernemental et construire une nouvelle chancellerie dans la boucle de la Spree.
Quant au coeur historique de la ville, entre la Porte de Brandebourg et la place de Leipzig, il a été livré aux promoteurs de tout poil, qui l'ont défiguré et transformé en une sorte de parvis de la Défense. Avec les scandales qui, dans le monde capitaliste, accompagnent ce type d'opération.
Pas étonnant, dans ces conditions, que le PDS, le seul parti qui a une présence militante dans les immenses cités de Berlin-Est et dont les discours ont une tonalité sociale, ait réalisé ce score.
Mais ni par le passé dont il est l'héritier, ni par les hommes qui le dirigent, ni par son programme actuel, le PDS ne représente une réelle perspective pour les travailleurs allemands. Car son objectif est avant tout d'obtenir une reconnaissance de la part de l'appareil politique bourgeois traditionnel, qui demeure méfiant à son égard et continue de le traiter de "communiste", ce dont il se défend.
Le succès du PDS aux élections berlinoises lui permet (théoriquement) de cogérer la capitale allemande, qui compte 3,38 millions d'habitants, avec le SPD, et il a bien sûr fait des offres de service en ce sens.
Mais le nouveau maire SPD, Klaus Wowereit, a une autre possibilité : former une coalition "tricolore" avec les Verts et le Parti Libéral (FDP) et des tractations ont déjà commencé en ce sens. Il faut rappeler à ce propos que ce même FDP a conclu, il y a à peine un mois, un accord pour diriger Hambourg... avec la CDU et un démagogue sécuritaire qui s'est présenté aux élections sur un programme demandant un renforcement de la répression tous azimuts !
Quel choix fera le SPD berlinois, difficile à dire mais ces tractations peu ragoûtantes démontrent que les travailleurs de Berlin auraient tort d'attendre une amélioration de leur sort d'un quelconque "bon accord", entre le SPD et le PDS, car cela ne ferait que mettre le PDS à la remorque du SPD... qui a déjà annoncé que, "pour éponger la dette", il supprimerait au moins 15 000 postes dans les services publics de la ville.