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- Lutte ouvrière n°1785
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Dans le monde
USA : pas de sacrifices en faveur des patrons : ils sont dans l'autre camp !
Nous reproduisons ci-dessous l'éditorial de The Spark du 7 octobre. Cette publication de l'organisation trotskiste américaine du même nom illustre l'importance des attaques menées par le patronat contre la classe ouvrière avec la complicité la plus complète des dirigeants syndicaux.
La réponse des cinq syndicats de la compagnie aérienne United Airlines à la demande scandaleuse de la direction que les salariés renoncent à quelque 9 milliards d'euros sur 6 ans a été la contre-proposition suivante : 5 milliards d'économies sur la masse salariale sur 5 ans. En divisant cette somme par les 66 000 travailleurs syndiqués d'United Airlines, cela représente 15 000 euros par an et par salarié !
Les cinq organisations syndicales affirment que cette proposition, accompagnée de quelques autres, permettrait à United d'accroître sa " rentabilité intrinsèque " de deux ou trois milliards de dollars par an. La presse syndicale n'a pas révélé quelles étaient ces " autres propositions " mais on peut être sûr que l'augmentation de la productivité - c'est-à-dire l'augmentation de la charge de travail de chaque salarié - est en tête de liste.
Le président du syndicat des stewards et des hôtesses a déclaré : " Pour garantir les intérêts à long terme du personnel navigant, il nous paraît essentiel d'aider United à surmonter à court terme sa crise financière. "
Il s'agit là de la collaboration de classe classique que les dirigeants syndicaux mettent en avant depuis des années. Malgré toutes les preuves du contraire, ils continuent d'affirmer que c'est en oeuvrant à la bonne santé de leur entreprise que les travailleurs garantiront leur propre bien-être.
Ce qui s'est passé dans le secteur du transport aérien démontre exactement le contraire.
En 1994, les syndicats de United avaient utilisé des arguments semblables pour justifier la série de sacrifices qu'ils avaient acceptés alors. Les pilotes et les mécanos, de même que les salariés non syndiqués, avaient renoncé à 4,8 milliards de dollars sous forme de réductions de salaires et de diminutions des cotisations patronales pour la retraite. En échange la direction leur avait octroyé 55 % des actions de l'entreprise... et la promesse que l'entreprise rétablirait les niveaux de salaires et de cotisations sociales dès que l'horizon s'éclaircirait.
Les choses ne se sont pas tout à fait passées comme promis. Il est vrai que les profits de l'entreprise sont montés en flèche : entre 1996 et 2000, United a engrangé 5,9 milliards de dollars. Jusqu'à la fin 2001, elle avait tellement d'argent de côté qu'elle a pu proposer de racheter US Air pour 4,3 milliards de dollars et payer les 7,3 milliards de dollars de dettes qui allaient avec.
Les travailleurs eux n'ont rien eu. Alors que les pilotes ont récupéré à la fin de l'année 2000 une partie de ce qu'ils avaient perdu, les autres travailleurs n'ont vu leurs salaires et les cotisations patronales pour leur retraite revenir à des niveaux normaux qu'au printemps dernier. Et à peine quelques mois plus tard, la direction vient réclamer de nouveaux sacrifices encore plus importants, se montant à 9 milliards de dollars.
Quant aux fameuses actions - qui avaient prétendument transformé United en une entreprise possédée par les travailleurs - elles ne valent presque plus rien aujourd'hui, 2,5 % seulement de ce qu'elles valaient en 1997, et l'entreprise, en menaçant de se mettre en faillite, montre qu'elle est prête à se débarrasser même de cette obligation-là.
Malgré toutes les déclarations contraires, les sacrifices n'ont pas sauvé les emplois. Ils n'ont pas permis une amélioration du niveau de vie des travailleurs. Ils ont simplement engendré une augmentation considérable de la richesses des directeurs et des gros actionnaires, ainsi que des capitaux disponibles pour acheter d'autres entreprises.
Les travailleurs et les patrons ne sont pas dans le même camp. Les patrons accumulent leurs richesses en nous exploitant. Nous ne pouvons nous défendre qu'en reprenant une partie de cette richesse. Les patrons placent leur intérêt avant tout. Les travailleurs doivent faire exactement la même chose.
Quand les patrons exigent des sacrifices, ils sont capables de produire un bilan montrant qu'ils sont au bord de la banqueroute. Mais le bilan est truqué. La preuve, c'est la vitesse avec laquelle les riches de ce pays se sont encore enrichis en laissant de plus en plus loin derrière eux le reste de la population.
La capacité des travailleurs de défendre leur niveau de vie ne dépend pas de ce que les bilans truqués font apparaître. Elle dépend de notre conscience du fait que nous n'avons rien en commun avec les patrons qui exploitent notre travail ; et elle dépend de notre détermination à nous battre pour nous-mêmes. C'est cela qui décidera du sort des travailleurs d'United aujourd'hui et du reste de la classe ouvrière demain.