La commercialisation du Régent, l'un des insecticides les plus utilisés, vient d'être suspendue par le ministre de l'Agriculture. Ce produit, commercialisé depuis 1996 et actuellement distribué par le groupe allemand BASF, est très toxique; sa molécule active, le fipronil, est accusée notamment de décimer les abeilles et de sérieux soupçons pèsent sur les risques qu'elle fait courir aux animaux et aux hommes.

Il aura quand même fallu huit ans de bagarres et de procédures judiciaires pour que les pouvoirs publics se décident à agir. Pourtant, le Régent, qui n'a jamais reçu d'autorisation officielle de mise sur le marché mais seulement une autorisation provisoire, aurait dû en être retiré depuis au moins trois ans. De même, si sa vente est aujourd'hui interdite, l'usage des stocks existants reste autorisé pour la prochaine saison, alors qu'en toute logique, les autorités auraient dû exiger que BASF -groupe puissant qui en a largement les moyens- les récupère et dédommage ses clients agriculteurs.

Cette affaire n'est pas sans en rappeler d'autres, comme celles de l'amiante, du sang contaminé ou de la vache folle. Par crainte de déplaire aux grands groupes industriels, les gouvernants laissent commercialiser ou utiliser des produits, même après qu'ils ont été reconnus comme dangereux, voire mortels. De droite comme de gauche, les ministres sont plus sensibles aux pressions des lobbies de la chimie, des semenciers et des céréaliers qu'aux arguments de ceux qui s'y opposent au nom de l'intérêt général et de la santé de la population.