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Dans les entreprises
Moulinex : Ce serait justice de faire payer les actionnaires de SEB
La reprise par SEB d'une partie de l'activité de Moulinex, prévue en octobre 2001 par un tribunal de commerce et confirmée onze mois plus tard par une décision du ministère des Finances, vient d'être contestée par le Conseil d'État. Celui-ci invoque l'intérêt des consommateurs, qui risquent de faire les frais de la situation hégémonique qu'occupe désormais SEB dans le petit électroménager. En réalité, derrière l'intérêt des consommateurs, il y a les intérêts de concurrents parmi lesquels Philips, à l'origine d'une plainte devant les tribunaux, car ils se sont vus écartés de la source de profit que pouvait représenter la reprise de certaines usines Moulinex.
Le Conseil d'État demande au ministre des Finances de mieux justifier sa décision, sans toutefois remettre en cause le cadeau royal que Moulinex représente pour les actionnaires de SEB. Or le scandale est là, car SEB a été autorisée à reprendre ce qui l'intéressait dans Moulinex, en laissant en plan plus de 3000 salariés sur 5600, à Alençon dans l'Orne, dans trois usines du Calvados et au siège de la Défense à Paris.
Le 21 novembre 2001, Élisabeth Guigou, qui était alors ministre de l'Emploi, avait demandé aux travailleurs de Moulinex de cesser l'occupation des locaux, assurant que l'accord conclu permettrait "aux salariés de quitter l'entreprise dans la dignité et d'être assurés d'une perspective de reclassement". Seulement, depuis lors, nombre de salariés sont restés sur le carreau. Quand la "cellule de reclassement" a fermé à la fin de juillet dernier, 891 personnes étaient toujours sans rien. Un millier avaient certes pu partir en préretraite, mais sans que SEB ait à payer quoi que ce soit. Quant à ceux qui ont retrouvé un emploi ou une formation, il ne s'agit pour certains que d'emplois précaires ou avec un salaire encore inférieur à celui qu'ils touchaient avant leur licenciement.
Or, en considérant les comptes de SEB, qui se vante d'une progression de 11,6% de sa marge d'exploitation au premier semestre 2003, on constate qu'une autre politique serait possible que celle qui consiste à laisser dans la précarité ou le dénuement une partie de celles et ceux qui ont trimé toute leur vie. Comme le signalait il y a quelques mois un journal financier, SEB "recueille les fruits du redressement de Moulinex". Le fait que la reprise de Moulinex soit contestée par des concurrents de SEB atteste qu'il s'agit bel et bien d'un magot.
Ce serait justice que les anciens actionnaires de Moulinex qui se sont enrichis personnellement en mettant l'entreprise en faillite, comme les nouveaux de SEB, soient avant tout obligés de payer de quoi vivre décemment aux anciens travailleurs de Moulinex.