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Michelin - Poitiers : Incertitudes sur l'avenir du site
L'usine Michelin de Poitiers, qui employait encore 774 salariés il y a un an et demi, n'en compte plus que 553 aujourd'hui, et peut-être 410 demain. Pour exiger des explications de la part de la direction quant à l'avenir du site, une journée de grève était organisée vendredi 11 février.
Cette usine, fabriquant des pneus pour les véhicules poids lourds, a été montée en 1972 et a compté jusqu'à 1200 salariés. C'est en juin 2003, alors que les effectifs étaient déjà tombés à 774 travailleurs, que la direction a rendu publique sa décision de supprimer 190 postes, sous forme de départs "volontaires" vers d'autres sites de production, de retraites ou de pré-retraites, auxquels il faut ajouter le licenciement d'une centaine d'intérimaires. Pour les patrons, les usines de Poitiers et de Joué-lès-Tours (éloignées de 100km), qui ont le même type de fabrication, semblent faire doublon. Il y a deux semaines, c'est une nouvelle chaîne de production qui a été déménagée vers le site de Joué. Déjà certains salariés font la route chaque jour. Mais la direction, malgré les pressions de l'encadrement, n'a toujours pas son quota de "volontaires" pour aller travailler ailleurs.
Récemment, Édouard Michelin, le dirigeant du groupe, dans une déclaration au journal La Montagne, laissait planer un doute quant à la pérennité des sites de production poids lourds fabriquant moins de 1 million de pneus à l'année (ce qui est le cas de Poitiers). Sur ce point, la direction locale, qui est commune avec le site de Joué-lès-Tours, se refuse à apporter des précisions. Ce mépris et l'incertitude du lendemain qu'il fait peser sur des familles ouvrières installées dans la région, sont usants.
La journée de grève, initiée par SUD, rejoint par la CGT et la CFDT, avait pour temps fort un rassemblement devant les portes de l'usine vers midi. Un appel à la solidarité avait été fait en direction des autres usines Michelin et par voie de tract au cours de la manifestation du 5 février à Poitiers. Trois cents personnes se sont ainsi retrouvées, des délégations venues des usines de Bourges, Cholet, Clermont-Ferrand, Joué-lès-Tours, Vannes... ayant répondu à l'appel. Après une conférence de presse et des prises de parole, la journée s'est conclue par une manifestation en direction de la rocade voisine pour informer les automobilistes.
Les profits de Michelin sont présents dans tous les esprits. Pour les augmenter, ce groupe capitaliste ne recule devant aucun sacrifice... à imposer aux travailleurs: en 1999, 7500 suppressions d'emplois étaient annoncées en Europe; dernièrement, il y en a eu 2400 autres. Ni le gouvernement de gauche de Jospin, hier, ni celui de droite de Raffarin, aujourd'hui, ne s'y sont opposés en quoi que ce soit. Dans le même temps, la fortune de la famille Michelin est estimée à plus d'un milliard d'euros par le mensuel Capital de juin 2004, et le rejeton de la famille, Édouard, augmentait son salaire de 146% en 2003. Il atteint ainsi 4,26 millions d'euros par an. Les ouvriers, eux, ne se sont pas enrichis par leur travail.
Les conditions de travail chez Michelin sont dures, et il n'y a aucune raison que les travailleurs supportent en plus des trajets à n'en plus finir, ou des déménagements, avec tout ce que cela suppose de bouleversements pour les familles qui ont leur vie ici. L'avenir du site n'est incertain qu'à cause de la rapacité des actionnaires.
Cette journée de mobilisation, avec le rassemblement qui l'a ponctuée, a redonné le moral aux travailleurs, mais tout le monde est bien conscient que, pour obliger la direction à s'expliquer, il ne faudra pas en rester là.