Bourse : Pour les actionnaires, c'est la belle vie!29/12/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/12/une1952.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Bourse : Pour les actionnaires, c'est la belle vie!

La Bourse de Paris a connu une progression de plus de 20% en 2005. Comparée à la détresse grandissante dans les quartiers et dans les classes populaires, la santé resplendissante qui règne dans ce temple du capital est insolente. Mais cette croissance des profits boursiers se nourrit justement de l'accroissement de la pauvreté et du chômage.

Elle est liée tout d'abord au montant des dividendes versés, cette partie des bénéfices que les entreprises distribuent chaque année à leurs actionnaires. Le montant du dividende versé en 2005 aux actionnaires des sociétés du CAC40 a progressé en moyenne de 30,9%, 22 milliards d'euros distribués cette année à ceux qu'on appelait autrefois les "tondeurs de coupon" (le coupon étant la partie qu'on détachait de l'action pour encaisser le dividende).

Certaines sociétés regorgent tellement de "cash", comme elles disent, qu'elles ont versé des dividendes exceptionnels en plus du dividende annuel. Ainsi Bouygues a versé en janvier 2005 un dividende exceptionnel de 5 euros par action, 1,9 milliard d'euros en plus alors que les investissements du groupe n'étaient que de 0,9 milliard! Ses dirigeants expliquaient à l'époque: "Tous nos développements sont financés. Nous n'avions pas de projet immédiat. Nous préférons rendre l'argent à nos actionnaires."

Autre méthode pour enrichir les actionnaires: le rachat d'actions. Autorisé depuis 1998, cette pratique consiste pour une entreprise à racheter une partie de ses propres actions qui sont ensuite généralement annulées. Mécaniquement, le gâteau des dividendes étant partagé en moins de parts, le dividende par action augmente ainsi que son cours à la Bourse: les actionnaires sont contents. Total, Peugeot, Carrefour et bien d'autres sont des habitués de cette pratique. Dix milliards ont été ainsi versés cette année sous forme de rachats d'actions.

En tout, dividendes et rachats d'actions ont représenté 32 milliards. C'est l'équivalent des deux tiers du budget de l'Education nationale. Si les dividendes ont augmenté ainsi, c'est d'abord parce que les bénéfices nets ont eux-mêmes augmenté dans les mêmes proportions, de 33,7% pour atteindre 57 milliards d'euros pour les sociétés du CAC40.

Cette importante croissance des profits ne provient pas de la croissance économique. L'investissement productif stagne, tout comme la production elle-même. La croissance des profits est tout d'abord le fruit direct d'une exploitation accrue des travailleurs qui se traduit par la baisse du pouvoir d'achat, par l'intensification du travail et les suppressions d'emplois, ensuite par le transfert de sommes toujours plus importantes des caisses de l'Etat et des services publics dans celles des entreprises.

Même quand le gâteau ne grossit pas, la part qui revient à la bourgeoisie ne cesse d'augmenter. Certains conseillers et analystes financiers s'inquiètent d'ailleurs du montant des dividendes versés, comparé à la faiblesse de l'investissement. Mais les mangeurs de dividendes ne manifestent pas d'état d'âme: ils s'empiffrent et en redemandent.

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