Médecins spécialistes : Payez d'abord, on soignera ensuite29/06/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/06/une1978.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Médecins spécialistes : Payez d'abord, on soignera ensuite

Une enquête réalisée sous forme de sondage auprès de 215 médecins installés en région parisienne, dans le Val-de-Marne, montre que 41% des spécialistes (psychiatres, gynécologues, pédiatres, ophtalmologues) et 39% des dentistes refusent de recevoir un patient bénéficiant de la CMU (Couverture maladie universelle). Et, comme on pouvait s'y attendre, le refus est plus fréquent parmi les médecins appliquant des dépassements d'honoraires. Ce que l'étude commente dans les termes aseptisés suivants: «Les logiques économiques occupent une place évidente dans les causes de refus.»

Que certains médecins pensent à soigner leur compte en banque plutôt qu'un malade pauvre, même si cela n'a rien de nouveau, cela n'en reste pas moins choquant. Mais que le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, fasse mine de s'indigner en qualifiant ces comportements d'«inacceptables» et de «contraires au code de déontologie» est d'une parfaite hypocrisie. Comme si ce n'était pas lui et le gouvernement dont il est membre qui continuent d'imposer une logique comptable dans la gestion des dépenses de santé, tout en mettant en accusation le comportement prétendument trop dépensier des malades!

Depuis vingt ans, la part des dépenses de santé prise en charge par la Sécurité sociale n'a cessé de régresser, tandis que la part remboursée par les mutuelles complémentaires ou payée directement par les malades grandit régulièrement. Les plans successifs de «redressement» de la Sécurité sociale, contrairement à ce que prétendent leurs défenseurs, ont en réalité abouti à un rationnement des soins: un rationnement par l'argent, donc un rationnement social.

Aujourd'hui, 4,8 millions de personnes n'ont d'autre choix que de se contenter de la CMU pour se soigner, ce qui révèle surtout les proportions prises par la pauvreté parmi les familles, les jeunes et les personnes âgées, obligés de survivre avec des revenus insuffisants qui ne leur permettent pas de faire face au prix de soins pourtant indispensables.

Les médecins qui refusent de soigner les patients pauvres ne sont qu'à l'image d'une société qui n'a aucun égard pour ses membres les plus démunis.

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