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Dans les entreprises
Les dangers de la légionellose... et l’irresponsabilité de la SNCF
Le 30 août, un cheminot de 52 ans des ateliers SNCF de Masséna, militant de la CGT, est mort sans que ses collègues aient alors connaissance de la cause réelle de son décès.
Ce n'est que le 6 septembre dernier qu'ils ont appris par la presse que, durant le mois d'août, quinze cas de légionellose avaient été recensés dans le secteur de la gare d'Austerlitz et que leur camarade était mort de cette infection. Aujourd'hui, le bilan s'est encore aggravé puisqu'une deuxième personne est décédée et que vingt autres sont atteintes, dont plusieurs toujours hospitalisées.
Dans un communiqué, la préfecture a désigné comme responsables deux tours aéro-réfrigérantes (TAR) servant à la climatisation de bâtiments de la SNCF et présentant des concentrations élevées de légionelles. Même s'il existe d'autres TAR dans le secteur, ces installations de la SNCF sont probablement à l'origine de la diffusion de la maladie.
Le lendemain du décès de notre camarade, la SNCF se félicitait de «participer activement aux mesures de prévention», car elle venait d'arrêter les tours de la gare d'Austerlitz. En fait, c'est plutôt l'opacité qui règne sur l'origine et les conditions de la propagation de la maladie.
La légionellose est une infection pulmonaire mortelle dans 15% des cas. Les tours aéro-réfrigérantes doivent être soumises à une surveillance très stricte. À partir de 1000 ufc/l («unités formant colonies par litre», c'est-à-dire en gros bactéries par litre), la concentration des légionelles devient anormale. L'exploitant doit alors nettoyer et désinfecter ses installations et révérifier le taux au bout de deux semaines. Si le taux dépasse 100000 ufc/l, l'exploitant doit totalement arrêter les installations. Puis il doit vidanger, nettoyer et désinfecter avant toute remise en service.
Or le 27 juillet une des tours était déjà mesurée à 8600 ufc/l. Le 30 août, elle était mesurée à 535000 ufc/l et une autre tour à 750000 ufc/l. Mais selon la communication faite par la SNCF, les tours n'ont été arrêtées que le 7 septembre.
Pour ceux qui ont contracté l'infection, il était déjà trop tard. Les tours continuaient à fonctionner, dans un secteur où travaillent des dizaines de milliers de salariés et où circulent quotidiennement des centaines de milliers de voyageurs.
La SNCF a confié la maintenance de ces tours à une entreprise sous-traitante. Le nom de cette entreprise n'a toujours pas été révélé, ni son cahier des charges. Les syndicats et les membres des CHSCT (comités d'hygiène et de sécurité - conditions de travail) des différents établissements du périmètre n'étaient même pas au courant de l'existence de ces installations, pourtant classées «à risques», et ne risquaient donc pas d'en contrôler l'entretien.
Enfin, si certains journaux ont informé leurs lecteurs qu'«en cas d'apparition de symptômes associés, toute personne ayant circulé dans cette zone doit se rendre auprès de son médecin», la SNCF n'a pas jugé bon de faire de même avec l'ensemble du personnel, pourtant directement exposé.
La légionelle est une bactérie dangereuse, mais l'attitude irresponsable de la SNCF l'est tout autant.