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Editorial
Les promesses ne remplacent pas des logements
Suite à la promesse du gouvernement d'assurer 27000 places d'hébergement pour les sans-logis, l'association Les enfants de Don Quichotte, à l'origine du campement le long du canal Saint-Martin à Paris, a décidé de mettre fin à son action. L'objectif de cette association ayant été d'attirer l'attention et de faire bouger les choses, cela étant fait, son appel à lever les campements peut se comprendre. Cela ne signifie pas pour autant que les mesures «au cas par cas» proposées par le gouvernement se traduiront par une place pour tout le monde et dans des conditions acceptables.
Nombre de sans-logis ont déjà annoncé qu'ils ne répondront pas à l'appel tant que les promesses ne seront pas suivies de propositions concrètes. Ils ont toutes les raisons de se méfier des promesses.
L'approche des élections aidant, on a entendu ceux qui nous gouvernent, les uns après les autres, faire mine de s'émouvoir du sort de ceux qui n'ont d'autre choix que de dormir dans la rue. Sarkozy y est allé de sa promesse que, s'il est élu, personne n'en sera réduit à vivre dans la rue d'ici deux ans. Chirac a aussitôt surenchéri en annonçant dans ses voeux une loi sur «le droit au logement opposable», charabia juridique qui signifie qu'une personne qui n'a pas de logement peut se retourner contre l'autorité publique. Puis Villepin a pris le relais lors d'une conférence de presse, entouré d'une brochette de ministres visiblement contents d'eux, se félicitant mutuellement de tous les efforts qu'ils auraient faits en faveur des sans-logis ou des mal-logés.
Tous ces gens-là sont au pouvoir depuis cinq ans et, pendant ce temps, le nombre de sans-domicile n'a cessé d'augmenter sans que cela ait troublé leur sommeil.
Sur le nombre de sans-domicile, ils mentent bien sûr comme sur le reste. D'après les associations qui s'occupent des sans-logis, le nombre de ces derniers serait de l'ordre de 100000, auxquels il faut encore ajouter celles et ceux, près d'un million, qui n'ont pas de logement à eux, qui vivent à demeure dans des campings ou qui dorment chez des parents ou des amis qui ont plus de coeur que nos gouvernants.
Dans cette économie capitaliste où seule compte la demande solvable, la partie la plus pauvre des exploités n'a jamais eu droit à autre chose qu'à des logements exigus ou insalubres, quand ce n'est pas à des taudis infects. Mais la spéculation immobilière qui dure depuis plusieurs années a encore aggravé la situation. Les prix se sont emballés et le nombre de logements à la portée d'un salaire ouvrier est de moins en moins suffisant par rapport à la demande, sans même parler de ceux, chômeurs, qui n'ont plus de salaire. Du coup, les bailleurs sont en position forte et sélectionnent parmi les demandeurs ceux qui offrent les meilleures garanties. Autant dire que les bas salaires ou les précaires n'ont aucune chance.
Autant dire, aussi, qu'il suffit d'un licenciement pour glisser dans la pauvreté, perdre son logement et ne plus en retrouver. D'après un récent sondage, 47% des personnes interrogées craignent de se retrouver sans logement.
Il manque dans ce pays plusieurs centaines de milliers de logements sociaux. Si l'État prenait directement en charge un vaste programme de construction, en réquisitionnant les terrains nécessaires, sans en passer par les grosses entreprises de construction et sans leur verser du profit, cela pourrait se faire vite et pour pas cher. Il faut qu'une partie conséquente du budget y soit consacrée. Mais on ne peut pas tout à la fois réduire encore l'imposition des profits des entreprises, comme vient de le promettre Chirac, et consacrer les crédits nécessaires à un vaste programme de construction de logements sociaux.
Il est facile de prévoir que les promesses faites aux riches seront tenues, et que celles faites aux millions de mal-logés ou sans-logement seront largement oubliées! À moins qu'ils se rappellent violemment au bon souvenir du gouvernement qui sortira des élections de 2007!
Arlette LAGUILLER
Éditorial des bulletins d'entreprise du 8 janvier