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- Lutte ouvrière n°2049
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Leur société
Prix du gazole : Marins pêcheurs et consommateurs dans le même bateau
Démarré à Lorient le 2 novembre, le mouvement de colère des marins pêcheurs s'est étendu en quelques jours à d'autres ports de Bretagne, de la côte atlantique et de la Manche. Les raisons en sont la difficulté grandissante éprouvée par les pêcheurs à vivre de leur travail, en particulier à cause de la hausse du prix du gazole, qui absorbe une bonne part de leurs revenus.
Un « comité de crise », constitué au début du mouvement au port du Guilvinec, dans le sud du Finistère, a, lors d'une assemblée générale réunissant près de 600 marins pêcheurs, stigmatisé le carburant dont le prix a doublé en deux ans. Alors que pour 2007, leurs calculs avaient été établis sur la base de 0,31 euro le litre de gazole détaxé, celui-ci leur est facturé actuellement entre 0,52 et 0,54 euro. Or, selon leurs calculs, un bateau ne peut guère être rentable au-delà de 0,30 euro le litre. Au Guilvinec, en particulier, le premier port du pays pour la pêche fraîche, la moitié de la flotte est constituée de chalutiers, les bateaux les plus gourmands en carburants, consommant entre 20 000 et 40 000 litres pour une campagne de deux semaines, ce qui représente entre 20 et 35 % de leur chiffre d'affaires.
Comme leurs ressources dépendent, en aval, du prix d'achat du poisson dans les criées par les grosses sociétés de mareyage qui fixent d'avance les prix en commun avec les grands réseaux de distribution, les patrons pêcheurs et les marins, rémunérés à la part de pêche, sont pris en tenaille. « Quinze jours de mer et 300 euros, ce n'est pas normal » criaient certains pêcheurs lors de la visite de Sarkozy au Guilvinec, le 6 novembre, certains d'entre eux ajoutant qu'ils hésitaient à partir pour gagner à peine plus que leur allocation chômage.
Il a suffi d'une hausse de 20 centimes par litre de gazole pour que les pêcheurs se sentent couler. C'est dire que le prix auquel mareyeurs et circuits de distribution leur achètent le poisson est scandaleusement bas, d'autant que les prix pour les consommateurs sont particulièrement élevés, eux !
Le 6 novembre au Guilvinec, les pêcheurs n'ont trouvé face à eux qu'un nouveau show d'un Sarkozy, flanqué du ministre de l'Agriculture et de la Pêche, Michel Barnier, qui proposait quelques pseudo-réponses à leur colère. Sarkozy a évoqué une exonération des cotisations sociales pour six mois, afin de compenser le « surcoût dû à l'augmentation récente du gasoil », puis demandé à « Michel » (le ministre) d'élaborer « un mécanisme qui réintègre le coût du gasoil dans le prix du poisson vendu à l'étal » en quelque sorte, le poisson indexé sur le prix du pétrole, et enfin un « plan de sauvetage » pour « moderniser les moteurs des navires ».
Rien, on s'en serait douté, pour prendre sur les profits monstrueux des pétroliers. Rien d'un début de réponse à la hausse vertigineuse du carburant, rien, en tout cas, pour les matelots !
Face à un gouvernement dont la sympathie se porte bien évidemment plus vers les gros poissons de la chaîne de commercialisation que vers les 24 000 marins pêcheurs, ces derniers ont tout à gagner à maintenir la vapeur pour pouvoir continuer à vivre de leur labeur.