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- Lutte ouvrière n°2050
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Dans les entreprises
Sevelnord - Hordain (Nord) : Le patron se fiche des ouvriers... et récolte une grève massive.
Mercredi 7 novembre, c'est une véritable provocation du patron qui a décidé un millier d'ouvriers de l'usine automobile de Sevelnord à se mettre en grève, une grève qui devait durer quatre jours.
Sevelnord est une filiale des groupes PSA et Fiat - qui en possèdent chacun 50 %. L'entreprise emploie 4 200 salariés, dont 3 000 ouvriers, et produit des monospaces (Peugeot 807, Fiat Ulysse ou Lancia Phedra) et des véhicules utilitaires (Peugeot Expert, Citroën Jumpy et Fiat Scudo).
C'est le directeur de cette usine qui s'était fait tristement connaître, en septembre dernier, en offrant une voiture à un ouvrier tiré au sort parmi ceux qui n'avaient pas manqué une seule journée dans les trois dernières années. Cela fait des mois que, comme dans tout le groupe PSA, le patron met la pression sur les ouvriers en leur expliquant que le site n'est pas assez rentable, qu'ils ne sont pas assez performants, que la qualité est trop mauvaise, etc.
C'est pourquoi, lorsque l'utilitaire produit à Sevelnord (Jumpy) a été primé " véhicule utilitaire européen de l'année 2008 ", cela a été ressenti par bien des ouvriers comme une preuve que leur travail n'était pas si mauvais que cela ! Mais c'est là que la direction a fait une petite erreur : pour " féliciter " les ouvriers de ce bon résultat, elle les a fait convoquer par la maîtrise pour leur offrir à chacun... une petite brique de jus d'orange (premier prix !) et un petit pain mal décongelé. Apparemment, elle croyait être quitte avec ça !
Ce geste de mépris a été la goutte d'eau (ou de jus d'orange ?) qui a fait déborder le vase et qui a révolté les ouvriers. Un groupe de travailleurs, écoeurés, a quitté la réunion et s'est mis spontanément à manifester dans l'atelier du Ferrage. La grève s'est répandue comme une traînée de poudre et a bientôt gagné toute l'usine. Le lendemain, avec l'apport des équipes de nuit et du matin, les grévistes étaient un millier. Ils exigeaient le versement d'une prime exceptionnelle de 1 200 euros, l'augmentation de la prime de nuit de 17 à 22 %, l'ouverture immédiate de négociations salariales, l'embauche des intérimaires et des CDD et le paiement des jours de grève.
Les militants de la CGT ont dès le début été les organisateurs du mouvement. Quant à FO et la CFTC, dont les responsables sont proches de la direction, ils ont choisi de rejoindre la grève, pour mieux la quitter dès que possible.
Jeudi 8 et vendredi 9, l'usine était presque totalement à l'arrêt. Le lundi matin, comme c'était prévisible, FO et la CFTC se retiraient de la grève. Mais cette manoeuvre de la direction fut loin de réussir, puisque le mouvement continua toute la journée du lundi 12 - nombre de grévistes commençant même à réfléchir à tous les problèmes de l'organisation d'une grève. Par exemple, il a été évoqué l'idée d'aller aux portes des nombreuses usines de la région pour populariser la grève et faire appel à la solidarité financière des autres travailleurs.
Mardi matin 13 novembre, en constatant que le nombre de grévistes avait diminué, les travailleurs ont préféré voter la reprise du travail, dans le but de reprendre tous ensemble, comme la grève avait commencé. Le travail a repris mercredi 14 au matin, après un barbecue fraternel organisé mardi 13.
Pour la majorité des ouvriers, c'était la première grève. Ils ont pu se rendre compte qu'ensemble, à 1 000, ils représentent une force collective qu'ils n'imaginaient pas. Et qu'ils étaient capables de se faire craindre de leur patron.