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Venezuela : La réforme constitutionnelle de Chavez repoussée
Immédiatement après son échec à imposer sa révision constitutionnelle par référendum, rejetée dimanche 2 décembre par 51 % de " non " contre 49 % de " oui ", le président vénézuélien Hugo Chavez a reconnu publiquement sa défaite.
La presse française, prompte à calomnier Chavez, a aussitôt applaudi à ce revers du président vénézuélien, qualifié, une formule désormais convenue, de " séisme politique ". Pour une fois, la grande presse n'aura pas besoin de prétendre, comme elle l'a fait à chaque succès électoral de Chavez, que ses partisans ont bourré les urnes !
Depuis que ce régime existe, la presse en effet ne se fait l'écho que des aspirations des possédants et des politiciens débarqués par le président vénézuélien, c'est-à-dire de tous ceux qui ne rêvent que du retour de l'avant-Chavez, un temps où les plus riches pouvaient s'enrichir sans laisser la moindre miette aux classes populaires.
Jusqu'à présent, la droite vénézuélienne, soutenue ouvertement par les États-Unis, avait été battue à plate couture dans toutes les consultations électorales, le président vénézuélien ayant même été réélu avec 60 % des voix en 2006. Elle s'était donc mobilisée contre ce référendum et avait poussé les étudiants sympathisant avec la droite à manifester dans la rue contre la nouvelle Constitution.
Sur le contenu de celle-ci, la droite a agité le chiffon rouge des formules creuses de Chavez sur le " socialisme du XXIe siècle ", les risques d'étatisme, ce qu'elle appelle la " cubanisation du régime ". C'est d'autant plus ridicule que, dans la Constitution refusée comme dans celle mise en place par Chavez au début de son régime, et qui va continuer à avoir cours, il n'est nullement question de mettre fin à la propriété privée des moyens de production. Bien au contraire, celle-ci est encouragée.
C'est d'ailleurs ce que reprochent à Chavez ceux qui le critiquent sur sa gauche, notamment certains syndicalistes de l'aile radicale de l'UNT, la centrale syndicale qui s'est forgée en résistant aux tentatives de la droite de garder le contrôle de l'État et de la compagnie nationale pétrolière, en 2002-2003. Sur sa gauche, Chavez se voit reprocher d'être partisan d'un " socialisme avec patrons ". Des groupes d'extrême gauche, relayant ces critiques, appelaient à " voter nul " au référendum.
La droite s'inquiétait aussi que Chavez tente de se donner plus de moyens de contrôle des activités bancaires, alors que celui-ci pour l'essentiel lui échappe, ce qui permet aux anciens comme aux nouveaux riches de continuer de prospérer.
Comme bien d'autres présidents d'Amérique latine, Chavez entendait ainsi échapper au couperet du système qui n'autorise que deux mandats présidentiels. Cela faisait dire à la droite que Chavez cherchait à être " président à vie ". Un argument repris ici par les journalistes qui ignorent visiblement que la Constitution française n'empêche pas le président de se représenter tout au long de sa vie, tant qu'il a la santé pour le faire !
À l'évidence, contrairement aux précédents scrutins, une fraction de l'électorat populaire, qui l'avait soutenu dans les consultations précédentes, ne s'est pas mobilisée, soit s'abstenant, soit votant nul. Ce revers fragilise évidemment la position de celui que la droite rêve de voir tomber depuis huit ans. Et, bien sûr, ce succès au référendum va donner des ailes à la droite pour demander le départ de Chavez.
Mais même si cet échec affaiblit sa position, Chavez, dont le mandat s'achèvera normalement en 2013, garde pour l'essentiel le contrôle du pouvoir. Il continue de s'appuyer sur l'armée. Il a toujours le soutien d'une grande partie de la population pauvre, qui a bénéficié, ce qui est rare en Amérique latine, des miettes de la prospérité du pays, basée sur la manne pétrolière.
Tant que rien ne vient vraiment le bouleverser, il peut réussir à maintenir cet équilibre. Jusqu'à présent, celui-ci a contribué à atténuer les conflits sociaux et, quoi qu'ils en disent, il n'a pas empêché les anciens possédants, comme les nouveaux parvenus, de continuer à s'enrichir.