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Editorial
Cirque présidentiel et accroissement de la pauvreté
À peine le couple Sarkozy, fraîchement marié, a-t-il fini sa lune de miel, passée en toute simplicité au château de Versailles, que ce monument accueille un autre cirque largement médiatisé. Les députés et les sénateurs réunis en Congrès sont conviés à adopter une modification constitutionnelle, pour permettre au Parlement de voter un traité européen qui ressemble comme deux gouttes d'eau à celui que les électeurs avaient rejeté par référendum en 2005. On nous parle de démocratie, de souveraineté populaire, mais les dirigeants politiques montrent eux-mêmes que tout cela n'est que fariboles. Quand les dirigeants de l'État font semblant de consulter la population, ils ne tiennent compte de son avis qu'à condition qu'elle dise " oui ".
Mais le mépris dont témoignent le président de la République et son gouvernement à l'égard de la population se manifeste dans bien d'autres domaines, qui touchent au plus près à la vie et aux conditions d'existence des classes populaires.
Sarkozy a le culot de se présenter comme le président du pouvoir d'achat, alors que celui-ci s'effondre même pour les salariés qui ont un emploi stable, et à plus forte raison pour les précaires, les chômeurs, les retraités. Les salaires n'augmentent pas, alors que s'envolent les loyers et les prix des biens de consommation les plus indispensables. L'institut de statistiques Insee signale l'accroissement brutal du nombre de ceux qui sont obligés de cumuler deux emplois pour toucher l'équivalent d'un seul salaire.
Et ce gouvernement, qui a commencé par accorder un cadeau fiscal de 15 milliards d'euros aux quelques dizaines de milliers de contribuables les plus riches, impose, sous prétexte de déficit de la Sécurité sociale - que ce cadeau aux riches aurait permis de combler largement -, les franchises médicales et des déremboursements de médicaments. La conséquence en est d'écarter des soins convenables des centaines de milliers de familles aux revenus modestes.
On manipule les statistiques pour leur faire dire que le chômage baisse, alors qu'en même temps les licenciements collectifs se suivent. La presse vient de rapporter le cas de cette entreprise de sous-traitance automobile dont les travailleurs ont surpris le patron en train de déménager nuitamment ses machines pour se délocaliser discrètement, sans même verser aux salariés le salaire du mois de janvier ! Et la presse de parler de " patron voyou ". Mais en quoi le patron d'ArcelorMittal, un des hommes les plus riches de la planète, est-il moins voyou, lui qui a promis lors de l'achat de l'entreprise de maintenir ses effectifs et qui se prépare à fermer son usine de Gandrange ?
Pour augmenter le profit des entreprises, le patronat et le gouvernement poussent vers la pauvreté une fraction croissante de salariés. Pressurer les plus pauvres pour enrichir les plus riches : voilà le sens de toutes les mesures gouvernementales, présentées comme des réformes indispensables. Le scandale de la Société Générale montre que l'argent accumulé n'est pas utilisé pour des investissements productifs créateurs d'emplois, mais alimente les circuits financiers où des milliards peuvent partir en fumée dans des opérations spéculatives.
Cette affaire ne lève qu'un petit coin du voile sur un immense gaspillage. C'est pour aboutir à cela qu'on aggrave l'exploitation dans les entreprises au nom de la rentabilité, qu'on réduit le personnel, qu'on fait des économies au détriment des services publics, des hôpitaux, des écoles, des transports collectifs.
Il est cependant possible de s'opposer à tout cela. Si les salariés et si les classes populaires ne veulent pas accepter d'être enfoncés dans la pauvreté, il faudra contester au patronat son contrôle exclusif sur les usines, les banques, les chaînes commerciales. On verra alors qu'en s'en prenant aux profits des actionnaires, il y a de quoi résoudre bien des problèmes de la société.
Arlette LAGUILLER
Éditorial des bulletins d'entreprises du 4 février