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Leur société
Le RSA ne réduira ni le chômage ni la pauvreté
Lorsque le gouvernement a décidé fin août de généraliser le RSA, revenu de solidarité active, les ministres et les membres de la majorité ont fait assaut de déclarations louangeuses, en affirmant que c'était là le moyen d'enrayer le chômage et la pauvreté. Le raisonnement sous-entendu est qu'il suffirait de cette incitation pour que les quelque 1,2 million de érémistes retrouvent, par miracle, tout d'un coup du travail.
Mais c'est là tout simplement une insulte pour ceux qui vivent cette galère. Le RSA ne va pas offrir un seul emploi supplémentaire à ceux qui en sont privés.
Des centaines de milliers de travailleurs se sont retrouvés au RMI parce qu'ils ont été licenciés, et qu'après 23 mois (aujourd'hui pour les moins de 50 ans) ils avaient épuisé leurs droits à l'indemnisation chômage. Ils devaient alors arbitrer entre deux calamités : l'allocation de fin de droits, l'ASS, et le RMI, un peu plus favorable pour les familles sans revenus. Ce n'est pas par choix qu'on accepte de survivre avec 448 euros par mois pour un célibataire, mais parce qu'on n'arrive désespérément pas à trouver du travail.
Le père du RSA, Martin Hirsch, annonce que son objectif est, dans les dix-huit mois qui viennent, de faire retrouver un travail à...100 000 titulaires actuels du RMI. C'est un objectif bien limité qui représente moins de 10 % des érémistes. Et encore ne s'agit-il là que d'emplois qui seront pour l'essentiel à mi-temps, et donc à paye très partielle. Pour le moment, avant les amendements éventuels des députés, le RSA implique un contrat de travail d'au moins vingt heures en moyenne par semaine, qui permettra au salarié de toucher avec le RSA 251 euros de plus que ce qu'il touchait aujourd'hui en reprenant un travail à mi-temps à la suite de son RMI (770 euros au lieu de 519). Comme le reconnaît le ministre de l'Emploi lui-même, cela risque de développer la précarité, car ce sont les patrons qui, dans certaines professions comme les services et la restauration, pourraient surtout y voir l'intérêt à employer quelqu'un à mi-temps, avec toutes les aides financières qu'ils recevraient en échange.
Pour donner un travail aux millions de salariés qui en sont privés, il faudrait que les patrons, les secteurs publics et l'État embauchent. La dernière baisse massive du nombre de érémistes a eu lieu entre 1999 et 2001 du fait d'une relative reprise économique, quand les patrons avaient en urgence besoin de main-d'oeuvre. Le nombre de érémistes a alors brutalement chuté de 400 000, sans aucun dispositif particulier d'accompagnement.
Interdire aux patrons de licencier dans les entreprises qui font des profits, supprimer toutes les aides que l'État et les collectivités distribuent en pure perte au patronat, et avec cet argent créer des centaines de milliers d'emplois utiles partout où il en manque, voilà ce qui serait le seul moyen efficace de lutter contre le chômage de masse et la pauvreté qui l'accompagne.