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Il y a 70 ans : La signature du pacte germano-soviétique
Le 23 août 1939, à Moscou, Ribbentrop et Molotov, les ministres des Affaires étrangères respectifs de l'Allemagne nazie et de l'URSS, signèrent un pacte de non-agression. Staline espérait ainsi contenir les ambitions de conquête d'Hitler vers l'est. Illusion de courte durée, puisque deux ans plus tard l'Allemagne nazie envahissait la Russie soviétique.
Pour défendre l'URSS menacée par l'expansionnisme de l'Allemagne nazie, Staline ne comptait pas sur la politique révolutionnaire qui avait été celle du jeune État soviétique, en 1917. Depuis la fin des années vingt, il avait tourné le dos à toute idée de révolution prolétarienne. À partir de 1934, il privilégia l'alliance, bien illusoire d'ailleurs, avec les États capitalistes comme la France (pacte Laval-Staline). Ce fut la politique « d'alliance des démocraties » et des « Fronts populaires » contre « les agresseurs fascistes ». En France, les dirigeants du Parti Communiste abandonnèrent toute idée de révolution sociale. Le PC devint nationaliste et même chauvin. Il se transforma en champion de la défense nationale. Pour lui, le conflit qui s'annonçait n'avait plus le caractère d'une guerre inter-impérialiste, mais celui d'un affrontement des « démocraties » contre le « fascisme ».
Face aux revendications de l'Allemagne nazie sur les Sudètes, en Tchécoslovaquie, Chamberlain pour la Grande-Bretagne et Daladier pour la France signèrent les accords de Munich, en 1938, avec Hitler et Mussolini. Ce fut une capitulation sans condition où ils donnèrent la Tchécoslovaquie en pâture à Hitler, espérant ainsi retarder la guerre. Chamberlain comme Daladier, représentants respectifs de leur bourgeoisie, laissaient ainsi les mains libres à Hitler pour son expansion à l'est et espéraient bien que celui-ci finisse par régler son compte à Staline. Tenu volontairement à l'écart de cette paix impérialiste par ses anciens alliés d'hier, Staline fit volte-face et signa un pacte avec Hitler.
Ce pacte scandalisa l'opinion bourgeoise et social-démocrate. En fait, il était dans la continuité de la politique menée par Staline depuis 1935, qui recherchait à échapper à la guerre grâce à une alliance avec un des deux camps impérialistes. Mais il incluait en outre des clauses secrètes prévoyant le partage de la Pologne entre l'Allemagne et la Russie, dont la mise en oeuvre fin septembre désorienta encore plus les Partis Communistes et les dizaines de milliers de militants pour qui Hitler, fossoyeur de la classe ouvrière allemande, était l'ennemi mortel des travailleurs.
Un virage diplomatique à 180° de la bureaucratie stalinienne
Cettte politique démoralisa et désorienta les classes populaires, et les militants communistes de ces « prétendues démocraties », comme l'écrivait Trotsky. En France, l'annonce de ce pacte fit l'effet d'une bombe. Certains militants communistes refusèrent d'y croire. D'autres le justifièrent en parlant de manoeuvre de Staline pour gagner du temps. De nombreux militants, écoeurés, déchirèrent leur carte. Des députés donnèrent publiquement leur démission et prirent des distances avec leur ancien parti. Tout comme le firent à leur tour nombre d'intellectuels, compagnons de route du parti. Et comment pouvait-t-il en être autrement, après avoir expliqué depuis 1934, à des centaines de milliers de militants, que l'ennemi c'était le fascisme ? Staline vendait désormais du pétrole et du manganèse à Hitler, expliquant que le peuple allemand aimait son Führer et que l'Allemagne était victime du « bloc impérialiste » anglo-français !
En France, la répression s'abat sur le Parti Communiste
Le pacte isola la Russie sur le plan international. En France, le gouvernement accentua la répression contre le Parti Communiste, qui avait déjà commencé au lendemain des accords de Munich. Le 25 août 1939, les deux quotidiens du PC l'Humanité et Ce Soir furent interdits, tandis que les distributeurs de tracts et les colleurs d'affiches communistes étaient systématiquement arrêtés. Le 2 septembre, la France déclara la guerre à l'Allemagne, qui avait envahi la Pologne la veille. Daladier demanda des crédits militaires supplémentaires et les députés communistes les votèrent ! Mais le gouvernement se fichait comme d'une guigne des actes de loyalisme du PCF qu'il qualifiait de « parti de l'étranger ». Lorsque la Russie envahit à son tour la Pologne, le 17 septembre, la chasse aux communistes fut ouverte. Le 26 septembre, le Parti Communiste et toutes les organisations communistes, liées ou pas au PCF, furent dissoutes par décret-loi adopté en Conseil des ministres à l'unanimité. Le PCF n'avait plus d'existence légale et fut réduit à l'activité clandestine. Le 8 octobre, les premiers députés communistes furent arrêtés. Daladier autorisa l'internement administratif, le 18 novembre. Durant les neuf mois qui suivirent la signature du pacte, la police française opéra 15 000 perquisitions et arrêta plus de 5 500 militants communistes français et étrangers résidant en France. En avril 1940 le décret Sérol - du nom d'Albert Sérol, ministre de la Justice et député SFIO (socialiste) de la Loire, ancien ministre de Léon Blum - autorisait la peine de mort pour qui nuirait à la défense nationale. Ce décret visait essentiellement les militants communistes.
Cette répression brutale porta un coup d'arrêt à l'intégration du PCF au sein de la société bourgeoise, commencée quelques années plus tôt avec la politique du Front Populaire. Elle provoqua toutefois un réflexe de solidarité chez les militants communistes, y compris ceux écoeurés par le pacte germano-soviétique. Le Parti Communiste entra alors dans une période difficile où, pour survivre dans la clandestinité, il dut affronter non seulement la répression de la police de Vichy, mais aussi celle de l'occupation allemande. Il connut de nouveau un succès à partir de 1942-1943, alors que l'URSS attaquée par l'Allemagne était redevenue alliée des impérialismes anglais et américain, puis au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Mais sur la base d'une politique nationaliste « d'Union sacrée ».
Il n'était plus d'ailleurs la « section française » d'une Internationale Communiste que Staline avait dissoute en mai 1943 pour complaire à ses alliés anglo-américains, mais le Parti Communiste Français. Ce qu'il est resté.