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- Lutte ouvrière n°2146
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SNCF : Réforme du fret -Le transport par rail et les cheminots dans le collimateur de la direction
Le gouvernement devait annoncer mercredi 16 septembre un « Plan fret d'avenir » doté d'un montant de cinq milliards destinés à « sauver le transport ferroviaire des marchandises ».
Mais derrière les effets d'annonce d'un énième plan, qui portera vraisemblablement sur des investissements d'infrastructure à long terme, et les déclarations alarmistes sur les déficits du secteur marchandises, la SNCF entend surtout restructurer la branche fret sur le dos des cheminots. C'est d'ailleurs ce qu'a annoncé le responsable fret de la SNCF, qui prévoit la suppression de 4 000 à 6 000 postes dans un secteur qui emploie 14 000 cheminots.
Cela fait en effet plus de trente ans que la part du fret recule. Ainsi, en 1974, le fret ferroviaire représentait 46 % des volumes transportés en France métropolitaine. Il n'en représente aujourd'hui plus que 11 %, un peu plus de 85 % étant dévolu au transport routier. Le transport par rail a donc été sacrifié au tout-routier, ce qui est un non-sens du point de vue de la collectivité, à la fois sur le plan économique, sur celui de la sécurité des personnes ou encore de l'environnement.
Pour justifier une telle régression, d'aucuns affirment que le coût du transport par rail est souvent plus élevé. Cela reste à démontrer. Mais s'il l'est c'est pour une raison simple : dans le transport routier, toutes les infrastructures, routes, autoroutes, ponts, rocades, sont construites et entretenues avec l'argent public, alors que le réseau ferré a été à la charge de la SNCF et maintenant de RFF. Si bien que depuis trente ans le réseau routier a triplé, alors que le réseau de chemins de fer a lui régressé. Dix mille kilomètres de voies ferrées ont été fermés depuis 1982. Faute d'entretien, les trains sont obligés d'adopter une vitesse réduite sur 1 800 kilomètres de voies. La moitié des lignes ne sont toujours pas électrifiées. L'âge moyen des locomotives est de 43 ans. On a aussi fermé 500 gares assurant un trafic de fret par wagons isolés, ainsi que des milliers de dessertes et de nombreuses gares de triage. 10 000 postes de cheminots affectés au fret ont été supprimés depuis 2003.
Aujourd'hui la SNCF qui, comme pour justifier l'abandon du fret, est devenue par ses filiales le premier transporteur routier du pays, annonce vouloir se désengager de 50 à 60 % du trafic dit des « wagons isolés », un transport sur mesure pour les particuliers et les industriels. La mise en oeuvre d'un tel programme amènerait sept cent milles camions supplémentaires sur les routes ; une tache, au moment où le gouvernement, disant vouloir lutter contre les rejets de gaz carbonique, s'apprête à faire les poches des ménages avec sa taxe carbone !
Tout l'été, les dirigeants de la SNCF n'ont cessé de mettre en avant le déficit du fret, mettant en cause le « coût » des cheminots. Dans un langage technocratique, un rapport parlementaire de juin dernier déversait sa hargne sur les cheminots en ces termes : « Les charges sociales pesant sur une entreprise telle que Fret SNCF créent des coûts de structure supérieurs d'au moins 30 % à ceux des autres acteurs » et d'autre part : « Le risque de grève décourage certains chargeurs majeurs d'utiliser le réseau fret français. »
Depuis plusieurs années, les cheminots du fret ont payé le désengagement qui s'est porté sur leur filière par des suppressions d'emplois massives. Aujourd'hui, la SNCF va plus loin et souhaite filialiser le fret en déplaçant des cheminots dans d'autres entreprises. À cette fin, elle a déjà interdit aux conducteurs fret de conduire des trains voyageurs, au mépris de la continuité du service.
Des rassemblements ont eu lieu récemment pour protester contre ces projets, à Thouars le 9 septembre, au Bourget le 16 septembre. Seule une mobilisation des cheminots peut en effet mettre en échec une politique irresponsable, tant sur le plan social que sur celui de l'environnement.