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Les départements au bord de la faillite ? Toutes les finances publiques pillées pour remplir les poches du patronat
Le président PS du Conseil général de la Seine-Saint-Denis, Claude Bartolone, a annoncé son intention de faire voter jeudi 8 avril un budget en déficit, ce que la loi interdit aux collectivités locales. Le budget serait alors imposé par le préfet. Ce bras de fer avec le gouvernement se veut une réponse à la non-compensation des missions que l'État a déléguées aux départements.
Cette situation n'est pas propre à la Seine-Saint-Denis. Selon la Direction générale des collectivités locales, 23 conseils généraux devraient avoir le plus grand mal à boucler leur budget cette année, présidés aussi bien par la gauche que par la droite. En 2011, 62 départements seraient sur la sellette, soit la majorité, selon le ministère de l'Intérieur. Les départements se disent plombés par les dépenses sociales obligatoires dont l'État leur a transféré la charge depuis des années sans en assurer le financement : RMI-RSA, allocations handicap. Ainsi en 2010, 3,5 milliards ne seraient pas compensés par l'État.
L'État se défausse de plus en plus de ses missions sur les collectivités locales, et cela dans tous les domaines, enseignement, investissements publics les plus variés, action sociale, logement, transport, santé. Cette politique a été menée par tous les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique. C'est même la gauche qui a donné un coup de fouet à ce désengagement de l'État en 1983, avec la décentralisation.
Ainsi c'est le gouvernement de la Gauche plurielle de Jospin qui a transféré aux départements l'APA (l'aide pour la garde des adultes handicapés), en décidant d'entrée de ne pas compenser totalement ce transfert. Quant au RMI et au RSA, c'est le rapport Mauroy en 2002 qui en préconisait le transfert et c'est la droite qui l'a mis en application.
Cette politique de mise à mal des finances locales n'a qu'un but, qui est de réserver une part toujours plus grande des fonds publics, issus des impôts, pour garantir les revenus du grand patronat, des banques et des classes riches. Car parallèlement, les impôts des entreprises réservés aux collectivités locales ont baissé considérablement, pour en arriver à supprimer la taxe professionnelle aujourd'hui.
La crise donne maintenant à cette évolution un tour dramatique, les besoins sociaux augmentant rapidemment pendant que les financements ne cessent de baisser. La fronde des présidents de Conseils généraux, comme celui de Seine-Saint-Denis, découle de cette situation. Cependant ce n'est pas le fond de la politique en faveur du patronat qui est mis en cause, mais seulement la répartition des finances entre celles de l'État et de ces collectivités. Dans aucun département on n'a vu les présidents de gauche annoncer qu'ils allaient, face à cette situation critique, supprimer les aides directes et indirectes qu'ils attribuent aux employeurs et au privé, y compris ceux du bâtiment et des travaux publics. Nulle part on n'a vu ces collectivités décider par exemple de mettre sur pied des organismes publics pour faire les travaux à prix coûtant, au lieu d'aides au financement d'entrepreneurs privés. Cela ne résoudrait sans doute pas les problèmes issus de la crise, mais cela montrerait au moins qu'une autre politique est possible que celle qui consiste à favoriser les plus riches.
Maurice Leroy, ex-notable du PC devenu député de la majorité sarkoziste, a déclaré que « même Arlette Laguiller à la tête d'un département n'y pourrait rien ! » Mais le problème n'est pas là : il est de changer de politique et de cesser de croire et faire croire que c'est en favorisant le capital privé et les plus riches que l'on pourra améliorer la situation.