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RATP - Dépôt de Saint-Denis : Les conducteurs de bus en colère
Les conducteurs de la vingtaine de lignes de bus du dépôt RATP de Saint-Denis se sont mis en grève vendredi 11 et lundi 14 juin. Ils ont réagi suite à l'agression d'un conducteur sur la ligne 368, gazé avec une bombe lacrymogène puis frappé au visage par un individu, parce qu'il ne lui avait pas ouvert la porte en dehors de l'arrêt.
Réfugié dans le terminus, le conducteur agressé a été trouvé là en état de choc par un de ses collègues, à qui le régulateur (un agent de maîtrise) a demandé par radio de repartir en abandonnant l'agent traumatisé. Cela a révolté tout le monde.
Le même jour, dans le quartier des Francs-Moisins à Saint-Denis, un bus 256 a été pris sous des tirs visant une voiture de police qui s'est protégée... en se plaçant derrière le bus ! Le lendemain, les bus du dépôt ne sont pas sortis. Les conducteurs ont dénoncé les agressions physiques successives (quatre en deux mois), les délais importants d'intervention de la police ou des équipes sécurité de la RATP (SEC), ainsi que la déshumanisation des terminus et de la régulation. La direction ayant retiré les régulateurs des terminus, afin de supprimer des postes, il y a moins de contacts entre les conducteurs et les régulateurs, et donc moins de présence sur le réseau.
À chaque incident, la réponse type de la direction est : « On ne peut pas mettre un policier dans chaque bus ». Un policier, peut-être pas, mais il fut un temps où il y avait deux agents par bus : un conducteur et un receveur ; et pour certaines agressions, comme celle du 368, cela aurait été dissuasif.
Le Comité d'hygiène et sécurité (CHSCT) du réseau bus avait quant à lui déposé un droit d'alerte. Non seulement la direction a refusé de le reconnaître, estimant que le secteur était sécurisé, mais elle a brandi son code 800, qui signifie « absence injustifiée sans solde ». Tout cela n'a fait que révolter un peu plus les conducteurs qui n'étaient absolument pas absents du dépôt et qui ont, à juste titre, pris ce code comme une sanction.
Finalement, la reconduction du mouvement le lundi 14 juin a amené la direction à plus de modération, pour tenir compte, a-t-elle dit, du contexte de travail. Une façon de reconnaître d'ailleurs que tout n'était pas si bien sécurisé.
Les conducteurs de bus de Saint-Denis, souvent jeunes, ont montré une forte solidarité entre eux. Ils vivent tous les jours des conditions de travail dégradées, avec les bus bondés. Les postes de conduite sont sales, les pannes fréquentes et, en prime, ils doivent supporter le mécontentement des voyageurs et l'agressivité qui se manifeste à la moindre occasion.
Comment ne s'inquiéteraient-ils pas de voir les bus et eux-mêmes devenir injustement une cible dans les quartiers difficiles, transformés en ghettos, où vit une population de plus en plus en difficulté ? Et comment ne seraient-ils pas choqués de voir leur direction rester sourde et aveugle aux problèmes qu'ils rencontrent, et muette quand il s'agit de répondre à leurs demandes ?