Le 28 octobre et après : Contre la réforme des retraites, la lutte continue !28/10/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/10/une-2204.gif.445x577_q85_box-0%2C12%2C167%2C228_crop_detail.png

Editorial

Le 28 octobre et après : Contre la réforme des retraites, la lutte continue !

Depuis la première manifestation à la rentrée, le 7 septembre, le gouvernement essaie d'enterrer le mouvement de protestation contre sa réforme des retraites. À chaque manifestation, il tente de démontrer que la participation est en recul. Eh bien, presque deux mois après, le mouvement est toujours vivant !

Le ministre du Travail, Eric Woerth, voudrait bien convaincre que, la loi entérinant l'attaque gouvernementale contre les retraités étant définitivement votée cette semaine par les deux Assemblées, les manifestations et les grèves n'ont plus aucun sens et qu'il ne reste plus qu'à obéir à la loi. Mais l'argument est doublement fallacieux. D'abord parce qu'on peut obliger le gouvernement à retirer une mauvaise loi. Et surtout parce que, si le mouvement s'est cristallisé autour du refus de retarder l'âge légal de départ à la retraite, le mécontentement qu'il exprime va bien au-delà.

Depuis des années, les travailleurs encaissent coup sur coup de la part du gouvernement et du patronat. Le coup contre les retraites, oui, mais aussi les licenciements, l'aggravation du chômage, l'avenir bouché pour les jeunes, le blocage des salaires, la multiplication des prélèvements qui aggravent encore la dégradation du pouvoir d'achat. Les raisons de la colère qui monte ne disparaîtront pas avec le vote de quelques centaines de notables des deux Assemblées.

Bien sûr, certaines grèves se terminent, mais d'autres continuent comme le du blocage du port de Marseille. Par ailleurs, ni les travailleurs des raffineries, ni les cheminots n'ont tous repris le travail. Du coup, le gouvernement entonne la chanson de la grève minoritaire.

Oui, les grèves et les manifestations n'ont pas mobilisé la majorité du monde du travail. Mais il faut un sacré cynisme pour parler d'un « mouvement minoritaire » à propos d'un mouvement qui a mobilisé, à travers des manifestations, des débrayages, des grèves, au bas mot deux à trois millions de travailleurs et qui bénéficie du soutien d'une grande majorité du monde du travail.

Même aujourd'hui, ce soutien continue. Malgré les inconvénients que représentent pour la population les trains qui ne roulent pas ou les pompes à essence à sec, c'est avec sympathie que le monde du travail considère ceux qui luttent. Même ceux qui ont choisi de ne pas s'engager dans le mouvement, ou pas encore, considèrent, confusément ou clairement, que ceux qui ont osé relever la tête ont raison.

Il faut un cynisme singulier pour parler dans ces conditions d'un mouvement minoritaire, de la part de la petite clique qui a pris la décision inique de repousser l'âge de départ à la retraite et d'allonger la durée de cotisation. Toute la population a pu constater comment l'État, qui a su trouver en quelques heures plusieurs centaines de milliards pour aider les banquiers, a choisi de s'en prendre aux trente millions de salariés qu'il y a dans ce pays pour combler un prétendu déficit de la caisse de retraite de quarante milliards en 2015.

Le mouvement a d'ores et déjà apporté un changement dans le climat politique du pays. Rappelons-nous la suffisance de Sarkozy et de sa clique avant que le mouvement s'engage, prétendant mensongèrement non seulement que les mesures qu'ils préparaient étaient nécessaires, mais aussi que le gouvernement agissait au nom et dans l'intérêt de la majorité de la population.

Grâce au mouvement et à la sympathie qui l'entoure, ceux qui dirigent l'État apparaissent pour ce qu'ils sont : de tristes pantins, qui gouvernent contre la majorité de la population et qui prennent leurs décisions en fonction des seuls intérêts des riches.

Et puis, il y a cet autre apport de la grève qui ne se chiffre pas, mais qui n'en est pas moins important pour l'avenir. Les deux à trois millions de femmes et d'hommes qui ont participé au mouvement ont fait ensemble l'expérience d'une lutte collective, l'expérience de manifestations et de grèves. Ils ont pu entrevoir la force de la classe ouvrière lorsqu'elle se mobilise.

Alors oui, ceux qui ont lutté et qui continuent à lutter sont sur la bonne voie, la seule en réalité pour le monde du travail. Les travailleurs ont relevé la tête. Il faut que ceux qui gouvernent ce pays et le grand patronat qui les commande sachent que désormais il faut compter avec eux. Le rapport de forces entre le grand patronat et le gouvernement d'un côté, et les travailleurs de l'autre, n'a pas encore fondamentalement changé. Mais ce n'est qu'un commencement.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 25 octobre

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