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- Lutte ouvrière n°2208
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Portugal : Contre le budget d'austérité - grève générale
Mercredi 24 novembre, les travailleurs portugais ont été appelés à une journée de grève générale pour exprimer leur refus des mesures d'austérité déjà prises par le gouvernement, et d'autres qui sont annoncées. Il faut remonter à 1988 pour retrouver un pareil appel commun des deux confédérations syndicales, la CGTP proche du PC et l'UGT proche du PS, actuellement au gouvernement.
Sous prétexte de réduire le déficit budgétaire (9,3 % en 2009, 7,3 % prévus cette année), de « défendre la crédibilité internationale du pays et de garantir le financement de notre économie », le gouvernement socialiste de José Socrates a fait adopter, en accord avec la droite, un budget 2011 qui est une déclaration de guerre à la classe ouvrière. Les 5 milliards économisés seraient fournis pour un tiers par des hausses d'impôts et pour deux tiers par des réductions de dépenses. Mais dans un cas comme dans l'autre, les travailleurs seront les plus frappés, et de loin.
Ainsi, la TVA va passer de 21 à 23 %, réduisant de près de 2,5 % salaires et pensions. Les salaires des fonctionnaires baisseront de 3 à 10 %, ce qui fera aussi pression sur les salaires du secteur privé, dans un pays où le salaire minimum est de 475 euros. Les pensions des retraités, déjà le plus souvent misérables, seront gelées. Quant au RMI, il va baisser, alors que le taux de chômage officiel se rapproche des 11 %. Le budget des municipalités perd 5 %, celui de la Santé 500 millions, celui de l'Éducation 400 millions, celui de la Sécurité sociale un milliard. L'État ne remplace qu'un salarié sur deux partant à la retraite et depuis des années multiplie les emplois précaires, en particulier dans l'Éducation : il va renvoyer l'an prochain 8 000 de ces enseignants précaires. Ce sont les autorités de l'Union européenne qui vont être contentes, elles qui se plaignent des « rigidités du marché du travail et de la formation des salaires » au Portugal !
Pour la bourgeoisie portugaise au contraire, ce sont de nouvelles largesses, sous forme de privatisations et d'exemptions d'impôts. Et pourtant, même si des pans entiers de l'industrie sont sinistrés, comme le textile ou la chaussure, les profits sont présents dans le secteur financier, refuge traditionnel d'une bourgeoisie parasitaire. Les quatre plus importantes banques privées ont réalisé 1,12 milliard de bénéfices sur les neuf premiers mois de l'année, 10 % de plus que pour la même période de l'an passé. Les obligations d'État à dix ans rapportent 6,4 %. Et lorsque Socrates a émis début octobre pour plus d'un milliard de bons du Trésor, la finance nationale et internationale a adoré, couvrant deux fois et demie l'offre. Les 500 millions de bons à trois mois se sont arrachés, les 531 millions de bons à un an aussi.
Le gouvernement affirme que ce n'est pas de gaieté de cour qu'il adopte ces mesures d'austérité, mais qu'elles sont indispensables. Selon Socrates, « c'est la seule façon de protéger le pays contre la turbulence des marchés financiers ». Et Cavaco Silva, le président de droite, abonde dans le même sens, parlant de « juste répartition des sacrifices ».
Mais les travailleurs ne s'y trompent pas et ont multiplié les actions en ce mois de novembre. Le 3, les travailleurs des Impôts ont fait un jour de grève nationale avec manifestations, suivi par des grèves tournantes jusqu'à la fin du mois. Le 6, jour de grève dans la fonction publique, une manifestation de 100 000 personnes a parcouru Lisbonne. Même les syndicats de policiers y ont participé. Le 17, ce sont les étudiants qui ont manifesté.
La grève du 24 pourrait permettre de mesurer la mobilisation des salariés du privé, jusqu'ici peu appelés à la lutte par les confédérations. C'est pourtant cette lutte commune avec les travailleurs du public qui peut faire plier la bourgeoisie et son gouvernement.