Au cours de l'émission télévisée Capital sur M6, dimanche 23 janvier, un reportage sur l'Auvergne a tellement déformé la réalité que certains journalistes sont apparus tels qu'ils sont : des bonimenteurs patentés, qui ont prétendu démontrer la bonne santé économique et démographique de cette région où, selon eux, on embauche à tour de bras, avec des salaires mirobolants.

La région Auvergne a beau s'étendre sur quatre départements, l'émission s'est limitée à un aperçu sommaire et microscopique concernant trois villes du même département, le Puy-du-Dôme. Rien n'a été dit sur la dépopulation du Cantal et de la Haute-Loire, ni sur les fermetures et les licenciements dans les entreprises de l'Allier et du Puy-du-Dôme.

Quelques journalistes ont en revanche réussi à dénicher la poule aux oeufs d'or : à Aigueperse, le cas d'un garagiste un peu particulier qui achète des voitures de luxe anglaises d'une cinquantaine d'années, comme la Ford Mustang, pour les restaurer et les revendre à des collectionneurs avec un bénéfice confortable. Et pour un tel travail, en guise de création d'emplois, il a embauché... cinq personnes !

Un autre exemple à Ambert, ville située à près de 100 km de Clermont-Ferrand : dans une PME qui fabrique des câbles, le patron se plaint d'avoir eu beaucoup de mal à faire venir un ingénieur et une quinzaine d'ouvriers et d'employés. Pourtant cet employeur est persuadé d'être très généreux en proposant des salaires nettement plus élevés qu'ailleurs, dit-il : 1 350 euros par mois, plus des primes, et même plus encore : un 13e et peut-être même un 14e mois.

Le troisième exemple concerne un ex-antiquaire, devenu quelque peu aventurier et qui a repéré, en plein centre-ville de Clermont, un immeuble Renaissance. Il projette de le transformer pour en faire un hôtel quatre étoiles, qui sera le plus luxueux de toute la région, avec des chambres dont chacune aura une décoration différente.

Pour trouver l'argent nécessaire, pas de problème : il suffit de s'adresser au Conseil régional. Notre homme recevra 1 100 euros par mois uniquement pour se consacrer à la réalisation de son futur chef-d'oeuvre. À cela s'ajoute, toujours de la part du Conseil régional, une subvention de 300 000 euros ; plus une aide technique non négligeable pour établir les plans et recruter les entreprises qui s'occuperont des travaux. Avec de tels moyens accordés si généreusement, comment ne pas être « enthousiaste et dynamique »?

Et voilà comment des journalistes dits d'investigation font l'impasse sur quelques « détails », comme l'existence de près de 40 000 chômeurs dans toute l'Auvergne et le silence total sur Michelin qui ferme des usines et supprime, rien qu'à Clermont-Ferrand, un millier d'emplois par an.