La Banque postale -- Centre financier de Paris 15e : Un suicide dont la direction est responsable21/09/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/09/une2251.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La Banque postale -- Centre financier de Paris 15e : Un suicide dont la direction est responsable

Jeudi 15 septembre, une travailleuse de La Banque postale s'est jetée de la fenêtre du 4e étage de l'immeuble où se trouve son service. Un geste irréparable lié au climat insupportable qui règne dans le centre. La direction porte l'entière responsabilité de la dégradation que tous subissent.

La Banque postale est la filiale de La Poste, choyée financièrement pour boursicoter. À l'instar des grandes banques, elle détient des titres de la dette de la Grèce, de l'Irland, de l'Italie, du Portugal, de l'Espagne. Feu la « banque des pauvres » spécule ainsi contre les pauvres. Et dans sa course pour jouer dans la cour des grandes banques, La Banque postale malmène son personnel afin de rattraper son retard de rentabilité. Pour faire peuple, elle se proclame « une banque pas comme les autres », mais elle traite son personnel comme les pires des patrons.

Depuis des années, les réorganisations s'enchaînent sans discontinuer. Il faut changer de service, d'horaires, apprendre un nouveau travail parfois en quelques heures, au côté d'un collègue lui-même débordé. Dans beaucoup de services le travail a été divisé en tâches parcellaires. On fait la même chose toute la journée, toute la semaine, et tout est compté : le nombre de chèques, de dossiers saisis, de pochettes traitées et d'appels téléphoniques pris.

Il faut en faire toujours plus, aller remplacer quelqu'un sur un autre poste de travail, et en prime être convoqué par le chef quand on a fait une erreur. Dans certains services, des réunions bourrage de crâne ont lieu toutes les semaines, sur le trafic et les objectifs. Le trafic passe à coup d'heures supplémentaires et avec le recours aux CDD, pris et jetés selon les besoins trop criants, sans jamais être embauchés.

En deux ans, au moins sept rapports faisant apparaître un taux de stress élevé et une nette augmentation des arrêts maladie ont été présentés en Comité d'hygiène et de sécurité (CHSCT). Pour seule réponse, la direction a proposé aux syndicats de signer un accord « santé au travail » pour tenter de nous dissuader de prendre des arrêts, en particulier de courte durée.

Cette situation a été dénoncée de multiples fois tant par des délégations de personnel, des pétitions, que par les collègues qui, à bout, se retrouvent en pleurs à l'infirmerie. Dans le service de notre collègue qui a commis son geste désespéré, il y avait déjà eu ces dernières années deux tentatives de se jeter par la fenêtre.

Alors, si l'une d'entre nous, parmi les plus fragiles, a craqué de façon irrémédiable, c'est dans la logique de ce que nous vivons tous.

Le lendemain du drame, le directeur Philippe Whal nous a fait transmettre une lettre individuelle où il parle de sa tristesse -- lettre que des collègues ont parfois refusée ou jetée à la poubelle, certaines disant qu'on allait peut-être nous f... la paix un moment, puis que tout recommencerait comme avant.

La direction fait semblant de regretter ce drame, mais ce ne sont pas ses regrets que nous voulons. Elle doit reconnaître sa responsabilité et mettre fin à une politique de pressions incessantes et insupportables.

C'est cela qu'il faut lui faire entendre, après le geste de désespoir de notre collègue.

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