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- Lutte ouvrière n°2252
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Editorial
Les dégâts de l'économie capitaliste en crise ne sont pas seulement matériels
Les travailleurs ont une double raison de se sentir concernés par cette journée. Les suppressions de postes, contre quoi protestent les enseignants, frappent tous les salariés, du public comme du privé. Et ce sont les enfants des classes populaires qui sont les premières victimes de la dégradation des conditions d'enseignement, des classes surchargées, du manque de personnel, enseignant ou pas, des suppressions de classes.
C'est la bourgeoisie elle-même et son État qui apportent la démonstration que tous les salariés sont logés à la même enseigne, qu'ils subissent les mêmes attaques des possédants, les mêmes économies à leur détriment et que les divisions entre catégories de travailleurs, entre différentes branches d'activité, n'ont aucune raison d'être.
Tous ceux qui n'ont que leur travail pour vivre doivent se sentir membres d'une même classe sociale qui, en cette période de crise, doit protéger les deux seuls moyens d'existence que l'économie capitaliste leur concède : l'emploi et le pouvoir d'achat du salaire.
L'attitude des directions syndicales, qui commencent par diviser les salariés au lieu de préparer un mouvement collectif, est d'autant plus inqualifiable. Pourquoi appeler à l'action les enseignants seuls et pas le personnel hospitalier ou les agents de la Fonction publique alors qu'ils ont les mêmes problèmes ? Et pourquoi les séparer du reste du monde du travail ? Il est question d'une journée d'action pour les retraités le 6 octobre et d'une autre, interprofessionnelle, le 11 octobre, sans même que les travailleurs sachent ce que ces directions leur proposent au juste.
La bourgeoisie, elle, bien que divisée sur une multitude de questions, se retrouve unie quand il s'agit de porter des coups aux salariés. Les directions syndicales sont en retard d'une guerre sur nos exploiteurs.
Bien sûr, pour que se développe un mouvement collectif assez puissant pour faire reculer les possédants, il faudra la détermination d'une grande partie du monde du travail. Mais les directions syndicales ne contribuent pas à ce que cette détermination surgisse. Elle est pourtant vitale. Elle l'est pour stopper l'aggravation du chômage dont sont responsables conjointement aussi bien le patronat qui licencie dans le secteur privé que l'État avec le non remplacement des départs à la retraite et la précarisation des postes. Les deux contribuent à ce que le chômage soit plus élevé encore pour les jeunes qui arrivent à la vie active que pour l'ensemble des travailleurs.
L'enseignement comme la santé fournissent aussi la démonstration que l'intérêt des salariés se confond avec celui de la société. Prenant exemple sur le grand patronat, l'État a introduit la notion de rentabilité jusqu'aux services publics, jusqu'à l'enseignement, jusqu'aux hôpitaux. Et, dans le vocabulaire de ces gens-là, il ne s'agit jamais de rentabilité sociale collective, de rentabilité humaine. Seul compte l'argent qu'une activité rapporte. Seul compte l'intérêt privé car, même lorsque c'est l'État qui fait des économies sur la Santé publique, sur l'Éducation, sur les services collectifs, c'est pour distribuer cet argent aux banquiers et au grand patronat.
Que font les possesseurs de capitaux de l'argent qu'ils récupèrent directement par l'exploitation ou indirectement par des cadeaux de l'État ? Ils n'en font rien d'utile pour la société. Ils le consacrent à des opérations financières, à racheter leurs propres actions afin d'accroître la fortune des actionnaires, ou ils le jouent dans des spéculations qui sont en train de ruiner la société. La société paie un prix de plus en plus fort pour enrichir une classe privilégiée avide et irresponsable, qui dirige une économie incontrôlable, guidée par les marchés aveugles et stupides.
Le gâchis n'est pas seulement matériel, l'exemple de l'enseignement le montre : éducation sabotée, enfants désocialisés. C'est toute la société qui est poussée vers la décomposition, la violence du chacun pour soi.
Voilà pourquoi tous les salariés doivent rejeter avec mépris tout appel aux sacrifices, explicite ou implicite, de ceux qui dirigent, si mal, la société. Ils doivent d'abord imposer leurs propres exigences : pas de licenciements ni de suppressions d'emplois ; répartition du travail entre tous sans diminution de salaire ; échelle mobile des salaires.
Et c'est dans la lutte pour ces objectifs, vitaux pour tous les salariés, que s'imposera la nécessité de contester à une classe capitaliste irresponsable sa mainmise sur les entreprises, sur l'économie et sur toute la vie sociale qu'elle mine et détruit.
Éditorial des bulletins d'entreprise du 26 septembre