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États-Unis : Après l'assassinat d'un jeune Noir
Le 26 février dernier, à Sanford (Floride), un jeune Noir, Trayvon Martin, 17 ans, sorti acheter des bonbons, a été abattu par le patrouilleur de quartier George Zimmerman, adepte de l'autodéfense, encouragée dans cet État par une loi baptisée « Défendez-vous » mais surnommée « Tirez d'abord » par ses adversaires. À ce jour, le meurtrier n'a toujours pas été incarcéré et la procureure vient de décider qu'elle ne réunirait pas de jury populaire pour statuer sur cette affaire. Depuis des semaines, cette affaire a déclenché dans de nombreuses villes des manifestations de Noirs américains pour exiger l'incarcération et des sanctions contre Zimmerman. Le bimensuel trotskyste américain The Spark (L'Étincelle) a consacré deux articles à cette affaire, dont voici des extraits.
(...) Les bandes vidéo de la police montrent que celle-ci a dit à Zimmerman de rester dans sa voiture mais qu'il n'en a rien fait. Au contraire, il en est sorti, avec une arme, et a poursuivi Martin. Alors même si Martin avait attaqué Zimmerman -- ce qui est peu probable -- cela aurait encore été Martin qui avait à « se défendre », comme l'incite la loi de Floride, et pas Zimmerman.
(...) Zimmerman a été laissé en liberté parce que son père est un ancien magistrat de la cour de Virginie et sa mère une employée de la cour. Mais le fait que leur fils ait pu rester aussi longtemps sans être mis en état d'arrestation, et que tout le système de la « justice » ainsi que les élus ne sont pas mobilisés dans cette affaire, montre que tout le système est raciste et qu'il faut s'en débarrasser.
(...) Il n'y a pas deux côtés à cette affaire. Trayvon a été lynché, de la même façon que beaucoup de jeunes Noirs l'ont été dans les années Trente, Quarante et Cinquante où on était lynché simplement pour avoir regardé un Blanc de travers.
Bien sûr, il n'a pas été lynché avec une corde et pendu à une branche d'arbre du Sud. Il a été abattu d'un coup de fusil dans la rue par un adepte de l'autodéfense qui l'a condamné à mort pour être « suspect » -- c'est-à-dire pour n'être rien d'autre qu'un jeune homme noir, marchant naïvement dans la rue.
Tout comme ces lynchages du temps passé, son meurtrier peut vaquer en toute impunité. Dans l'État raciste de la Floride d'aujourd'hui, le meurtre d'un jeune homme noir n'appelle aucun châtiment. Et si une sanction devait voir le jour, elle ne viendrait que des meetings et des manifestations déclenchés par cet acte en Floride mais aussi dans tout le pays.
Trayvon Martin était censé être un de ces jeunes hommes chanceux, un joueur de football estimé dans son école, vivant une vie assez confortable. Il n'en a pas moins été abattu. Il ne peut pas être plus clair, dans les États-Unis racistes d'aujourd'hui, que la chasse aux jeunes Noirs est ouverte.
Un jeune homme noir sur dix meurt avant d'avoir 18 ans. Certains sont tués par des racistes, d'autres par des policiers, la majorité par d'autres jeunes Noirs. Et tous vivent dans des conditions difficiles créées par la pauvreté et les besoins non satisfaits : manque d'emplois avec un taux de chômage de 70 % pour un Noir sans diplôme ; absence d'accès à des études décentes puisque le pays dépense pour un jeune Noir des quartiers pauvres des grandes villes moins d'un tiers de ce qu'il alloue aux enfants des bourgeois des banlieues résidentielles.
(...) Cela aussi est une sorte d'assassinat, une sorte de lynchage de toute une génération de jeunes hommes noirs, et de jeunes femmes également. Il y aurait pourtant assez de richesses dans la société capitaliste pour que cette carence systématique puisse être éradiquée en une génération. (...)