Amiante : Les empoisonneurs doivent être jugés06/03/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/03/une2327.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Amiante : Les empoisonneurs doivent être jugés

Jeudi 28 février, plusieurs centaines de membres de l'Andeva, l'Association nationale des victimes de l'amiante, se sont rassemblés au Palais de justice de Paris. Ils protestaient contre la procédure engagée par le parquet pour faire annuler la mise en examen de plusieurs hauts fonctionnaires mis en cause dans une affaire d'amiante concernant des travailleurs de l'usine Ferodo-Valeo de Condé-sur-Noireau. Parmi les mis en examen, la plus connue est la maire de Lille, Martine Aubry.

Deux cars de travailleurs étaient venus de Condé-sur-Noireau. Ils se sont retrouvés avec les veuves des victimes de Dunkerque, deux délégations de travailleurs italiens et belges, et bien sûr des membres de toutes les Adeva du pays, les Associations départementales des victimes de l'amiante. Ils espéraient pouvoir assister à l'audience, mais le huis-clos a été imposé, en dépit des protestations des avocats des victimes. Les manifestants sont donc restés dans la cour du palais.

La seule et unique juge qui instruit des affaires pénales concernant l'amiante est Marie-Odile Bertella-Geffroy. Toujours menacée d'être écartée de cette activité, elle entend pointer toutes les responsabilités dans les affaires qu'elle instruit depuis 2005, c'est-à-dire non seulement les industriels qui ont amianté tout le pays jusqu'en 1997, date bien tardive de l'interdiction de l'amiante, mais aussi les hauts fonctionnaires qui, en tant que représentants de l'État, leur ont facilité la tâche. Ils ont, soit fermé les yeux, soit même participé activement à la diffusion des mensonges sur l'amiante, présenté pendant quatre-vingt-dix ans comme inoffensif alors que sa nocivité avait été mise en évidence dès 1906.

Martine Aubry est mise en examen parce qu'elle a été directrice des relations du travail au ministère du Travail entre 1984 et 1987. Cela ne préjuge pas de sa responsabilité. Mais c'est certainement pourquoi le parquet a été si prompt à tenter de mettre un terme à ces poursuites.

Pour les victimes de l'amiante, le sort de Martine Aubry est secondaire, le problème est de savoir s'il sera un jour possible d'engager des poursuites pénales contre les responsables de ce scandale. Car, même si un fonds d'indemnisation des victimes a été mis en place, les victimes attendent aussi des sanctions pénales contre tous ceux qui, à un titre ou à un autre, ont trompé les ouvriers qui manipulaient l'amiante et leurs familles, parfois victimes indirectes du cancer généré par l'amiante, l'asbestose. Celui-ci tue chaque année trois mille personnes, un chiffre destiné à augmenter d'année en année.

Pendant des années, tous les bâtiments du pays, y compris bien des édifices publics, ont été amiantés du sol au plafond. Et, pour ne rien arranger, même s'il est timidement mis en oeuvre, le désamiantage génère des centaines de milliers de tonnes de déchets dangereux gérés en dépit du bon sens.

Quant à établir les responsabilités, la protection sans faille de l'État dont ont pu bénéficier les responsables de ce scandale se poursuit aujourd'hui. Depuis dix-sept ans, date à laquelle les premières plaintes ont été déposées, aucun procès n'a mis en cause par exemple les dirigeants de la société Eternit, une des entreprises les plus actives de l'amiantage (qui prospère d'ailleurs aussi aujourd'hui dans le désamiantage !)

C'est pourquoi il faut empêcher que la procédure engagée soit annulée, comme cela est envisagé par la justice.

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