- Accueil
- Lutte ouvrière n°2362
- « Charity business » : Micro-dons et maxi-pub
Leur société
« Charity business » : Micro-dons et maxi-pub
Il y avait déjà l'opération Pièces jaunes de Bernadette Chirac, destinée à aider les enfants hospitalisés. Partant du principe que les petits ruisseaux font les grandes rivières, voici maintenant que se généralise ce qu'il est convenu d'appeler les micro-dons.
Depuis septembre, plusieurs magasins Franprix de Paris proposent « l'arrondi » à leurs clients : pour une dépense de 8,53 euros, par exemple, ceux-ci paient 9 euros, la différence allant abonder un fonds qui sera redistribué à des organisations caritatives. Monoprix et Casino envisagent de faire la même chose. Fin octobre, chez Monoprix, on pouvait passer en caisse des bons de deux euros destinés à soutenir Emmaüs.
Cela ne se limite pas aux commerces d'alimentation. La Société générale, entre autres, a créé une « carte citoyenne » (que le client paie quand même 12 euros !) et, à chaque utilisation de cette carte, elle s'engage à verser 0,05 euro à des associations caritatives. Des entreprises sont incitées à demander à leurs employés s'ils seraient volontaires pour qu'une somme qualifiée de modique soit retenue chaque mois sur leur salaire. Et pourquoi ne pas arrondir toutes les factures : gaz, électricité, téléphone ? L'idée est dans l'air.
Les entreprises qui pratiquent le micro-don jouent les vertueuses et jurent, la main sur le cœur, qu'elles ne gagnent pas un centime sur l'opération, que tout l'argent récolté va bien à des organismes caritatifs. C'est possible mais, en attendant d'être reversé, il alimente bel et bien leurs comptes en banque, et rien ne les empêche de le faire fructifier. En tout cas, les mêmes qui imposent des prix d'achat cassés à leurs fournisseurs et font payer cher les consommateurs se font par ce moyen de la publicité à bon compte.
Tout ce business autour de la charité est écœurant. C'est sûr qu'il y a trop de gens misérables en France et dans le monde. C'est sûr aussi qu'un ou deux euros ne pèsent pas lourd sur le budget de celui qui a un salaire correct. Mais la charité n'a jamais permis d'éradiquer la misère. Et quand elle est pratiquée par de grandes sociétés capitalistes, c'est pour elles l'étalage d'une bonne conscience d'autant plus révoltante qu'elle est le fait de ceux qui prospèrent grâce à l'appauvrissement de la majorité de la population.