Politique agricole commune : Une nouvelle mouture qui ne changera pas la donne08/11/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/11/une2362.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Politique agricole commune : Une nouvelle mouture qui ne changera pas la donne

Menée depuis plus de cinquante ans, la Politique agricole commune (PAC) consiste essentiellement en une subvention du secteur agroalimentaire par l'Union européenne. La nouvelle mouture, qui couvrira la période 2014-2020, distribuera au total 373 milliards d'euros, environ 9 milliards par an pour ce qui concerne la France. Ces subventions sont destinées, selon les responsables européens, à « assurer un niveau de vie équitable à la population agricole et des prix raisonnables aux consommateurs ».

Les bénéficiaires de la PAC sont restés longtemps ignorés du grand public, mais en France, la liste des sociétés recevant des subventions est accessible à tous depuis 2011, les particuliers restant toujours anonymes sous prétexte de ne pas porter atteinte à leur vie privée. La publication de cette liste a montré que la réalité était bien éloignée des objectifs affichés par l'Union européenne.

Pour la période 2011-2012, les industriels de la volaille Doux et Tilly-Sabco comptaient parmi les principaux bénéficiaires. Ils ont touché à eux deux 75 millions d'euros. D'importantes entreprises agricoles, qui constituent parfois de véritables trusts, ont aussi reçu des aides substantielles : la Sucrière de la Réunion (31 millions), France Luzerne UCAD, spécialisée dans les céréales et les aliments pour le bétail (13,5 millions), Savéol, gros producteur breton de fruits et légumes (5,5 millions)... Plus généralement, les aides ont été très inégalement réparties, 60 % des agriculteurs ne touchant que 20 % des subventions.

Les subventions européennes peuvent constituer une partie importante des revenus des petits agriculteurs, si bien qu'il est courant d'entendre dire qu'avec ces aides, ils vivent aux crochets de la collectivité. Mais en fait, même les aides versées aux plus petits du secteur reviennent finalement aux plus gros, en particulier aux industriels et aux grands distributeurs. Ce sont elles qui permettent à ces derniers de vendre plus cher les fournitures et de payer moins cher les productions des agriculteurs.

Dans cette situation, l'exode rural continue et les exploitations se concentrent toujours plus. Ces dix dernières années, le territoire français a perdu un quart de ses agriculteurs. Si certains de ceux qui restent sont de véritables entrepreneurs au niveau de vie plus que confortable, d'autres se débattent dans les difficultés financières, étranglés par les banques qu'ils doivent rembourser après s'être endettés pour moderniser leur exploitation, et par les industriels et distributeurs auxquels ils vendent leurs productions à bas prix. La situation est tellement difficile pour certains que ce secteur faisait dernièrement l'actualité pour un taux de suicides particulièrement élevé.

Pour la période 2014-2020, Hollande a vanté une PAC plus juste, avec une meilleure répartition des subventions. Mais cette nouvelle mouture de la PAC ne remettra pas en question le fonctionnement capitaliste de l'agriculture, où ceux qui tirent les marrons du feu sont les industriels, les gros producteurs et les gros distributeurs.

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