Ce compte pénibilité a d'abord été négocié en 2013 avec la confédération CFDT, en échange de sa signature approuvant l'allongement à 43 années de cotisation pour toucher une pension de retraite complète.

Pour finaliser sa loi, le gouvernement a choisi la collaboration de Michel de Virville, ex-DRH de Renault, membre des directions de l'UIMM et du Medef. Un expert de la condition ouvrière ! Résultat, les décrets d'application sont volontairement inextricables, une usine à gaz dit le patronat. Leur expert a bien oeuvré pour que la pénibilité au travail continue à ne pas être prise en compte et pour escamoter la prévention. Le comble est que le gouvernement l'a chargé d'en suivre l'application.

Pour acquérir quelques points sur leur compte individuel, les salariés devront continuer d'endurer de mauvaises conditions de travail pendant des années. Voici quelques exemples : lever et porter des charges de 15 kg ou pousser et tirer des charges de 250 kg pendant 600 heures dans l'année ; effectuer trente tâches répétitives par minute pendant 900 heures par an ; travailler 900 heures par an à une température inférieure à 5°C ; travailler de nuit pendant 120 nuits par an, etc.

Une de ces conditions de travail pénible, comptabilisée par le seul encadrement, donnerait droit à quatre points par année, huit points si le salarié cumule plusieurs nuisances. En récompense des souffrances subies, dix points donneraient droit à un trimestre de diminution du temps de travail, compensée financièrement, ou de retraite anticipée. Mais les vingt premiers points acquis devraient d'abord obligatoirement servir à une formation professionnelle.

Le compte pénibilité est une vaste fumisterie, mais il a servi à quelque chose : fournir à des dirigeants syndicaux l'alibi d'une prétendue négociation.