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Leur société
Hollande à Canal Plus : vacuité en direct
Le passage de François Hollande à l’émission Le Supplément, diffusée en clair sur Canal plus dimanche 19 avril, était annoncé comme un événement. Les journalistes de cette chaîne sont censés être jeunes et impertinents, l’émission se veut drôle, ironique et sans tabou. Les spécialistes en communication de l’Élysée avaient défini la cible, les jeunes, et le style, la gravité présidentielle avec des vraies pépites d’humour dedans.
On a commencé par constater, dans le reportage Une semaine avec le président, que la vie n’était pas trop dure aux sommets de l’État : dîners de gala, visite de musée, déjeuner au soleil, partie de rigolade des ministres avant le Conseil, apéro avec un grand patron venu voir le clébard présidentiel. On en oublierait presque que l’interviewé est censé présider aux destinées d’un pays en guerre sur trois fronts et, d’après lui, menacé d’attentats terroristes à tout instant, où le chômage atteint des sommets et dans lequel la misère fait chaque jour des progrès, tandis qu’un parti d’extrême droite progresse d’élection en élection.
À propos du chômage, Hollande a répété sur tous les tons qu’il se battrait jusqu’au bout. Et d’égrener la litanie des cadeaux au patronat depuis le début de son mandat, suivie de celle des cadeaux à venir. Puis il a repris les thèmes en vogue au Medef : il faut faciliter les licenciements pour permettre aux patrons d’embaucher ; il conviendrait d’inventer un dispositif qui mette à la disposition des entreprises une main-d’œuvre jeune quasi gratuite ; il faut inciter les chômeurs à reprendre un emploi, ce qui sous-entend que, s’ils n’en ont pas, c’est de leur faute.
Après un reportage sur une classe de seconde d’un lycée de la banlieue parisienne, Hollande a répondu brièvement aux questions de cinq élèves. Le débat, si on peut dire, a porté quasi exclusivement sur les questions de religion, tolérance, vivre ensemble et autres tartes à la crème qu’on sert à la jeunesse en guise de morale et de philosophie de la vie.
Hollande est en place pour gérer les affaires du grand patronat et de l’impérialisme français, mais il n’en a bien sûr pas été question. Par ailleurs, il gère les siennes et celles de son parti, de sa coterie, et il n’en a pas été question non plus. L’émission était calibrée en vue des prochaines échéances électorales pour, paraît-il, reconquérir la jeunesse. Mais, à la montée conjointe du chômage, de la misère et des idées réactionnaires, le président socialiste n’a à opposer que son discours de moulin à prières et son sourire béat. Il faudrait que la jeunesse soit bien bête pour se laisser séduire par une telle vacuité.