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Accueil des migrants : droit d’asile peau de chagrin
Le projet de loi sur la réforme du droit d’asile, adopté par les députés en décembre 2014, est en discussion depuis lundi 11 mai au Sénat. La majorité sénatoriale, de droite, a annoncé la couleur : elle veut durcir le texte du gouvernement, accusé d’aboutir à grossir le flux des demandeurs d’asile et le nombre des immigrés clandestins.
Pourtant, le sort des demandeurs d’asile non seulement risque de ne pas s’améliorer, mais il pourrait même s’aggraver avec la réforme du gouvernement, même sans les amendements des sénateurs.
Le gouvernement veut ramener le délai de traitement des dossiers de demande d’asile de deux ans actuellement à neuf mois en 2017, grâce à la simplification des démarches et au « désengorgement des institutions ». Ce délai pourrait même être réduit à trois mois quand l’étranger vient d’un pays dit sûr, c’est-à-dire considéré par l’administration comme démocratique et respectueux des droits de l’homme. Enfin, le projet de réforme déclare vouloir améliorer les conditions d’accueil des demandeurs d’asile. Aujourd’hui, un tiers d’entre eux sont logés dans des centres d’hébergement d’urgence, dans des conditions inacceptables, un autre tiers devant se loger par ses propres moyens.
Les associations d’aide aux demandeurs d’asile, si elles reconnaissent prudemment au projet de réforme certaines avancées, en pointent surtout les reculs pour ceux qu’il est censé mieux protéger.
Ainsi, fait remarquer la Cimade, « la mise en œuvre de ces dispositions dépend largement des moyens financiers qui seront alloués pour les préfectures, l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides), etc. et pour garantir un hébergement et une allocation à tous les demandeurs. » Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a promis la construction de 5 000 hébergements, alors qu’il en faudrait au moins 20 000 : on est loin du compte !
En outre, la réduction des délais de traitement des dossiers sera obtenue grâce à la création de procédures accélérées. Mais, « pour bien juger ces dossiers fragiles, il faut du temps... Derrière l’idée d’une amélioration, se cache un faux semblant », commente la présidente d’une de ces associations, qui y voit un danger car « accéléré rime avec expéditif ».
En outre, si le gouvernement justifie sa réforme par la constatation que « le dispositif français est aujourd’hui inefficace », c’est aussi parce qu’« il crée une incitation au détournement de la procédure d’asile à des fins migratoires ». Et c’est là que le bât blesse. « Le gouvernement est aveuglé par le contrôle des flux d’immigration », constate un avocat spécialisé dans l’aide aux migrants. Rien à voir donc avec la protection des demandeurs d’asile, au contraire : pour ces derniers, tout cela n’augure rien de bon. Hollande, sur ce plan là aussi, ne vaut pas mieux que Sarkozy.