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Leur société
Procès Wildenstein : spécialistes de l’art… de l’évasion fiscale
Lundi 4 janvier a commencé au tribunal correctionnel de Paris le procès pour fraude fiscale du richissime marchand d’art franco-américain Guy Wildenstein. Quelques-uns de ses conseillers, avocats ou notaires, ainsi que des établissements bancaires, sont également sur la sellette.
Ce sont deux veuves de la famille qui, s’estimant flouées dans le partage de l’héritage, ont révélé la manière dont les Wildenstein, depuis des générations, dissimulaient au fisc l’essentiel de leur énorme fortune.
La plupart des biens de la famille se trouvent enregistrés au nom de trusts situés aux Bahamas ou à Guernesey, hors d’atteinte du fisc. Ces structures financières héritées du droit anglo-saxon permettent de donner la gestion de l’essentiel de la fortune familiale à des institutions de confiance. Officiellement sortis du patrimoine, ces biens sont exonérés des droits de succession. L’un de ces trusts, Delta, est ainsi propriétaire de tableaux valant un milliard de dollars et qui se trouvent en réalité aux États-Unis et en Suisse.
La fortune des Wildenstein ne s’arrête pas là. On y trouve entre autres, outre la résidence en Suisse, une autre dans le quartier le plus chic de New York, une écurie de courses à Chantilly, un château dans l’Essonne, un îlot privé dans les îles Vierges, un ranch de 30 000 hectares au Kenya, plusieurs galeries d’art, etc.
En 2011, Guy Wildenstein, qui prétend « ne rien comprendre à la fiscalité », a été mis en examen. L’alerte avait été donnée bien avant, mais le fait qu’il soit un des membres fondateurs de l’UMP et un ami personnel de Sarkozy n’avait pas particulièrement stimulé le zèle d’Éric Woerth, le ministre du Budget de l’époque, à déclencher une procédure !
Deux redressements fiscaux de 550 et 450 millions d’euros ont fini par être imposés à la famille. Deux juges d’instruction ont estimé que les trusts étaient fictifs, avec pour seul but d’échapper à l’impôt, que le patrimoine était en réalité toujours géré par la famille et par ses conseillers à coups de fausses conventions de prêts, fausses factures, etc., d’où le procès actuel pour fraude fiscale et blanchiment.
Pour ce procès emblématique, et qui risque de durer, combien de fraudeurs restent dans l’ombre ? Les contrôles fiscaux sont infiniment moins fréquents sur les très grandes entreprises ou les très grandes fortunes que sur les petites ou même sur les particuliers. Selon un rapport de quatre ONG datant de novembre 2015, la France est en deuxième position pour le nombre de comptes en Suisse ouverts par ses ressortissants, qui y dissimuleraient 12,5 milliards d’euros.
Le gouvernement se vante d’avoir fait payer deux milliards d’euros à 45 000 repentis. Mais c’est encore peu de chose face aux montages qui permettent à des particuliers multimillionnaires ou à des entreprises multinationales, comme Total, de transférer des profits énormes dans des paradis fiscaux, de façon tout à fait légale.