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Leur société
Le FN revoit son discours : un parti bourgeois et les mots pour le dire
Le FN se prépare pour l’élection présidentielle de 2017 et Marine Le Pen a annoncé sa candidature. Mais le problème de l’heure, pour ce parti, est de gagner la confiance de plus larges couches de l’électorat de droite et du patronat, afin d’être considéré par celui-ci comme un parti de gouvernement comme les autres.
Certes, le FN a toujours eu comme centre de gravité le milieu des petits commerçants et petits patrons réactionnaires plus ou moins nostalgiques de l’Algérie française, viscéralement anticommunistes et antiouvriers avant même d’être profondément racistes. Mais, depuis des années, la stratégie de sa direction a consisté à développer une démagogie en direction de l’électorat populaire, en particulier celui des déçus de la gauche. Du coup, les postulats fondamentaux de l’extrême droite se sont fait moins entendre. Le FN ne parlait plus de l’abolition du smic, de la retraite à 67 ans, de la fin de l’impôt sur le revenu, qui avaient été la base du programme électoral de Le Pen père. Sa fille préférait parler de la sortie de l’euro, cherchant ainsi à accréditer son hostilité à la finance et aux banques. Mais un tel discours inquiète l’électorat de droite et surtout le grand patronat, qui tient pour ses affaires à l’appartenance à la zone euro.
C’est pourquoi, à l’issue d’un séminaire où différents courants se sont confrontés, le parti d’extrême droite a décidé d’infléchir sa propagande électorale. S’il affirme toujours sa volonté de sortir de l’euro, c’est en essayant d’en atténuer la forme. Il préfère parler de souveraineté monétaire plutôt que de sortie de l’euro, de négociation avec les institutions européennes plutôt que de référendum populaire sur cette question. Et, surtout, il a décidé de mettre en avant des mesures qui caressent le petit patronat dans le sens du poil : baisse des impôts sur les sociétés, soutien aux TPE-PME, etc.
Ainsi, le FN change de discours, ou plutôt de fond musical. Pensant que l’électorat populaire qui a voté pour lui, notamment aux régionales, lui est désormais acquis, il veut donner des gages de respectabilité, comme il se doit pour un parti qui se veut de gouvernement. Certes, les grands capitalistes qui orientent la politique des gouvernements savent pertinemment qu’une fois au pouvoir les partis leur obéiront, indépendamment des programmes défendus précédemment. Mais ils tiennent tout de même à ce que les politiciens susceptibles de les servir ne se laissent pas aller dans leurs discours à une démagogie trop éloignée de leurs intérêts, sur laquelle il leur serait plus difficile de revenir ensuite.
Alors, le FN s’y emploie aujourd’hui, afin d’être en état de servir les intérêts du grand patronat demain.