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Leur société
Dans la « jungle » de Calais : le fauve, c’est l’État
Vendredi 12 août, le tribunal administratif de Lille a refusé la destruction, décidée par la préfecture, des épiceries, coiffeurs, cafés et restaurants construits par des réfugiés ou des bénévoles, qui sont aussi des lieux d’échange et d’information, où on peut recharger son téléphone portable.
Après avoir multiplié les contrôles et fait fermer les commerces fin juillet, la préfecture prévoyait de les détruire, sous prétexte qu’ils sont illégaux, ne respectent pas les règles d’hygiène et de sécurité du public, et qu’ils prospèrent « en exploitant la vulnérabilité des migrants ».
C’est cette décision que le tribunal administratif a annulée, soulignant que, même si les problèmes d’hygiène existent, ces échoppes « constituent des lieux de rencontre apaisée entre migrants et avec les bénévoles », et que la disparition de tous les commerces « de façon indifférenciée se ferait indéniablement au détriment des migrants ». La préfecture a fait appel devant le Conseil d’État, et a annoncé qu’elle continuera les contrôles débutés en juillet.
L’État utilise le prétexte des problèmes sanitaires réels, mais ne fait rien pour améliorer la salubrité du camp, où les maladies sont fréquentes et les rats prolifèrent. En novembre 2015, il avait fallu une décision de justice pour contraindre l’administration à créer dix points d’eau supplémentaires, cinquante toilettes et des accès pour les services d’urgence. À la fin du mois de février 2016, l’État avait violemment détruit la moitié sud du camp, en promettant de reloger les occupants. Mais la plupart des relogements proposés étaient loin de Calais, et nombre de migrants, qui souhaitent toujours passer en Angleterre, sont allés s’entasser dans la partie nord de la « jungle », elle-même menacée d’un futur démantèlement.
Avec l’augmentation de la population du camp cet été, 2 000 personnes de plus qu’en juillet selon les associations, les files d’attente lors des distributions de repas durent plusieurs heures, et la tension augmente. La disparition des commerces ne ferait qu’aggraver encore la situation.
En fait, la politique de l’État vis-à-vis des migrants de Calais ne consiste certainement pas à améliorer leurs conditions de vie, mais à expulser, réprimer, et à détruire le peu que les associations réussissent à construire.