Loi El Khomri : dictée par le patronat07/09/20162016Journal/medias/journalarticle/images/2016/09/p4_loi_el_khomri_ok.jpg.420x236_q85_box-0%2C318%2C1492%2C1158_crop_detail.jpg

Leur société

Loi El Khomri : dictée par le patronat

L’ancienne plume et conseiller en communication de Myriam El Khomri, qui a claqué la porte au moment où la loi travail était rendue publique, dévoile, dans un livre intitulé Ils ont tué la gauche, les coulisses de cette loi.

Illustration - dictée par le patronat

Pierre Jacquemain, un trentenaire qui fut conseiller de Clémentine Autain et de Bruno Julliard à la mairie de Paris avant de suivre El Khomri dans les ministères de la Ville puis du Travail, appartient à la mouvance des frondeurs du PS qui voudraient « refonder la République » et « faire renaître la gauche ».

S’il révèle la naïveté de son auteur, qui croyait pouvoir peser de l’intérieur sur la politique du gouvernement, ce témoignage montre le fonctionnement ordinaire de l’État et la vraie place des ministres et des députés. Il illustre aussi, en creux, l’impasse des solutions préconisées par la « gauche de la gauche ».

Jacquemain raconte comment le projet de loi travail a été entièrement rédigé par le directeur de cabinet du ministère du Travail, en reprenant toutes les exigences formulées par les patrons, sous le contrôle direct du cabinet de Valls. Pendant ce temps, la ministre, à peine informée, recevait des délégations syndicales en répétant qu’elle préparait une loi « ambitieuse et progressiste ». Selon son ex-conseiller, elle n’aurait pris connaissance de « sa » loi que quelques heures avant une interview exclusive au journal Les Échos. Son directeur de cabinet, ancien haut fonctionnaire de la commission des Finances, déjà en place sous Sapin et Rebsamen, est le véritable ministre du Travail. Son maintien a été imposé par Hollande et Valls lors de la nomination de la ministre.

Quant aux parlementaires de la majorité, supposés voter cette loi, ils ont reçu le projet quinze jours après l’envoi du texte au Conseil d’État. On voit que ministres et députés, complices et non pas victimes de cette mascarade, ne sont pas mieux traités que des paillassons.

Tout cela n’a rien de nouveau. L’appareil d’État est une machine conçue pour défendre les intérêts des grands patrons et des possédants, quel que soit le résultat des élections et la couleur des majorités successives. Jacquemain et ses amis politiques voient le problème dans la soumission de Hollande ou de ­Valls aux technocrates, mais ceux-ci, comme tous les gouvernants de gauche, de Blum à Mitterrand ou Jospin, sont d’abord des serviteurs zélés du capital.

Les centaines de milliers de travailleurs qui ont manifesté durant quatre mois contre la loi travail ont bien compris que la gauche menait la même politique que la droite. Elle a montré la même haine de classe quand la classe ouvrière a commencé à relever la tête et à se défendre. Pour changer durablement leur sort, les travailleurs devront poursuivre dans cette voie, retrouver confiance dans leur force collective et s’organiser sur le terrain politique mais certainement pas faire renaître, sous une forme ou sous une autre, cette gauche de gouvernement.

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