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Maroc : les manifestants du Rif bravent l’état de siège
Dans la région du Rif, au nord-est du Maroc, la mobilisation ne faiblit pas malgré la répression. Lundi 26 juin, des manifestations ont eu lieu à El-Hoceima et aux alentours, alors que la ville était placée sous un couvre-feu non officiel mais bien réel, et totalement coupée des environs par des barrages policiers.
Le mouvement de contestation El Hirak, qui dure depuis près de huit mois à El-Hoceima et dans les villes voisines, a connu une nouvelle phase à partir de la fin du mois de mai, après l’arrestation de nombreux militants et de ses principaux dirigeants. À la dénonciation du chômage, qui frappe un nombre particulièrement élevé de jeunes, à la revendication de services publics dignes de ce nom, dans le domaine de la santé ou de l’éducation, les manifestants ajoutent désormais une nouvelle revendication : la libération immédiate de tous les détenus, qui seraient aujourd’hui près de 200. Ils dénoncent aussi les mauvais traitements que ceux-ci ont subis dans les commissariats, qui ont conduit dix-neuf d’entre eux à l’hôpital et sont attestés par des marques de coups sur tout le corps chez les autres. Ces mauvais traitements continuent en prison, avec l’éloignement des leaders à Casablanca, la limitation à dix minutes de la visite des familles et l’interdiction de parler le berbère rifain.
Après les premières arrestations, la répression a continué avec la mise en place d’un véritable quadrillage policier d’El-Hoceima, destiné à empêcher tout regroupement. La place Mohamed VI, où se sont tenues les grandes manifestations précédentes, leur étant désormais interdite, ainsi que les faubourgs de la ville, les manifestants ont continué à se rassembler sur les collines à la tombée du jour, scandant des slogans et invectivant les policiers restés en bas. À l’occasion de la fin du ramadan, ils ont décidé de braver la police et ont appelé à un rassemblement lundi 26 juin à 15 heures au centre d’El-Hoceima.
Dès l’aurore, des barrages policiers étaient mis en place sur les principaux axes routiers desservant la ville. Mais des manifestants ont réussi à passer en empruntant les sentiers de montagne et à rejoindre les milliers de manifestants d’El-Hoceima, alors que d’autres choisissaient de manifester dans les villes alentour. Dans tous les cas, ils ont eu pour seule réponse les matraques, les bombes lacrymogènes et de nouvelles arrestations.
Le pouvoir a pour le moment choisi la méthode répressive pour arrêter le mouvement. Sa crainte est qu’il perdure et qu’il fasse tache d’huile dans d’autres régions du Maroc, elles aussi touchées par le chômage, la pauvreté et l’indigence des services publics. Maniant la carotte et le bâton, le roi Mohamed VI a fait mine de découvrir la situation du Rif et a reproché à ses ministres le retard pris dans la mise en place d’un programme de développement de la région, officiellement lancé en 2015 et qui s’est enlisé dans les sables depuis. Il a même privé de vacances une partie des ministres concernés.
Les manifestants d’El Hirak, toujours mobilisés, ne sont sans doute pas dupes de cette hypocrisie, tout comme l’une des leaders, Silya Ziani, arrêtée pour, entre autres, l’usage du slogan « Sa Majesté le peuple ».