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Italie : rien à attendre d’un nouveau gouvernement
Près de trois mois après les élections du 4 mars, y aura-t-il finalement un gouvernement en Italie ? En tout cas le projet d’alliance entre les prétendus « antisystème » du Mouvement 5 Étoiles (M5S) et de la Ligue d’extrême droite a encore achoppé le 22 mai sur le nom du chef de gouvernement proposé.
Giuseppe Conte, un proche du M5S, avait l’aval des deux partis. Las, il s’est avéré que ce professeur de droit, mis en avant pour sa compétence prétendument acquise auprès d’universités prestigieuses, était en fait inconnu desdites universités et aurait quelque peu « bidonné » son CV. Le président de la République Mattarella a donc demandé qu’on lui soumette une candidature plus sérieuse et il faudra encore attendre.
Reste le contrat de gouvernement laborieusement conclu entre les deux mouvements qui, il n’y a pas si longtemps, ne manquaient pas de s’insulter. Il est significatif de ce qu’on peut attendre, ou plutôt ne pas attendre, d’une alliance de ces deux partis. Ce « contrat pour un gouvernement de changement » est fait de promesses aussi floues que démagogiques, cimentées par un violent discours antimigrants.
Sur le plan social, ce programme évoque la remise en cause de la précédente réforme des retraites qui portait à 67 ans l’âge minimum de départ... pour la remplacer par une autre qui n’y changerait certainement pas grand-chose. Le « revenu de citoyenneté » qui a été à la base de la campagne du M5S serait mis en place, mais seulement à partir de 2020. Il garantirait aux chômeurs et aux retraités pauvres un revenu mensuel de 780 euros, mais cela assorti de toute une série de conditions qui rendraient l’attribution de ce RSA version italienne plus que problématique. Le taux d’imposition serait « simplifié » et abaissé. Sous le prétexte de relancer ainsi la consommation, les entreprises bénéficieraient de baisses fiscales tout comme les particuliers.
Évoquée dans les tractations préliminaires, l’idée d’une sortie de l’Italie de la zone euro est écartée, à la satisfaction évidente des milieux d’affaires et de la Commission européenne, en charge de l’euro, dont le vice-président a exhorté le futur gouvernement à viser une « croissance via des réformes ». Vu l’importance de la dette publique italienne, la politique d’austérité devrait évidemment continuer.
En revanche, le programme n’est pas en reste de démagogie xénophobe et antimigrants, fonds de commerce privilégié de la Ligue, mais auquel le M5S n’est pas non plus étranger. Il y est estimé que « 500 000 migrants irréguliers sont présents sur [le] territoire [italien] » et que des « procédures accélérées ou de reconduite à la frontière » sont à mettre en œuvre, quitte à transférer à cette fin les crédits jusque-là prévus pour l’accueil des réfugiés. L’hypothèse selon laquelle le ministère de l’Intérieur serait attribué à Salvini, le dirigeant de la Ligue, laisse prévoir une politique violemment anti-immigrés.
Les commentaires alarmistes n’ont pas manqué dans la presse pour agiter l’épouvantail d’un tel gouvernement « populiste » qui pourrait mettre en cause l’ancrage européen de l’Italie et dont les milieux d’affaires pourraient avoir à s’inquiéter. Mais ceux qui ont à s’en inquiéter sont avant tout les classes populaires et les travailleurs, qu’ils soient italiens ou étrangers. Les promesses et la démagogie envolées, c’est à un gouvernement violemment anti-ouvrier qu’ils doivent s’attendre, tout comme ils doivent se préparer à combattre sa politique.