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Hôpitaux : état d’Urgences
Des services d’urgences hospitalières unissent leurs voix pour faire éclater le scandale des conditions d’accueil des patients. La démarche, initiée à Paris, commence à fédérer des hôpitaux d’autres villes.
Une prime de 100 euros proposée par le directeur de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris est dénoncée comme inégalitaire par les infirmiers et les aides-soignants mobilisés, car elle ne bénéficierait qu’aux infirmiers qui font l’accueil, alors que les risques et les difficultés sont les mêmes pour tous. Tout en faisant bloc entre eux, les paramédicaux des Urgences pensent obtenir une revalorisation salariale et des effectifs, avec l’argument de la spécificité de leur travail. Cependant, au fur et à mesure qu’ils détaillent la saturation des Urgences, ils en viennent eux-mêmes à dénoncer la régression de tout le système hospitalier.
En fait, les services d’urgences sont la pointe la plus visible de l’iceberg. Faute d’avoir obtenu une consultation dans un délai raisonnable, des patients arrivent dans un état aggravé. Faute de lits disponibles dans les divers services spécialisés, les malades pris en charge restent aux Urgences, mobilisant des soignants qui ne peuvent pas s’occuper assez rapidement des derniers arrivés. À Valence, le clip vidéo chanté par l’équipe des Urgences reflète le plan d’économies drastiques infligé à tout l’hôpital.
La fermeture de services d’urgences dans les hôpitaux périphériques entraîne l’engorgement des Urgences de l’hôpital principal, comme à Mulhouse où le personnel a manifesté en filtrant les entrées, vendredi 26 avril. La transformation d’un hôpital local en Ehpad ou bien en hôpital de proximité, où la Maternité fermée est réduite à un centre de suivi périnatal, a le même effet. C’est contre ce type de déclassement de leur hôpital que travailleurs et usagers ont manifesté samedi 27 avril à Morlaix. Depuis cinq mois, le mouvement des gilets jaunes s’est largement fait l’écho de la dégradation des possibilités de soins.
À Paris, lors des grands débats organisés en février dans plusieurs grands hôpitaux, des personnels de toutes catégories avaient vertement exprimé leur indignation de pouvoir de moins en moins soigner correctement. Et lundi 15 avril, sur fond de grève des Urgences, lors de la séance de restitution de ces grands débats, le directeur de l’AP-HP et celui de l’agence régionale de santé (ARS) se sont fait directement prendre à partie. Une aide-soignante de la Pitié-Salpêtrière, citée par le journal Libération, leur a crié : « Vous vivez dans un microcosme, on vous fait des compliments, mais venez voir. Nous, nous sommes des petits ouvriers qui tentons de rester humains. »
Jeudi 25 avril, dans son discours, Macron a prétendu ne plus vouloir fermer d’hôpitaux mais a confirmé leur réorganisation. Buzyn, la ministre de la Santé, promet, elle, d’augmenter les crédits consacrés à la qualité et à la pertinence pour les établissements de santé : des carottes pour les directeurs qui feront semblant de faire mieux avec moins. En ce qui concerne la psychiatrie, dont le personnel s’est mobilisé l’été dernier, elle annonce une refonte du financement pour réduire l’inégalité entre établissements, mais à enveloppe constante : de la démagogie pour jouer les uns contre les autres.
Parmi les grévistes des Urgences, certains comprennent que, pour inverser la politique en cours, il faudrait que le mouvement se généralise à tous les autres services. Déjà le simple fait qu’ils ne se laissent pas faire est un encouragement pour tous les travailleurs hospitaliers et au-delà.