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- Lutte ouvrière n°2698
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La société en crise
Grand patronat : solidaires avec eux-mêmes
Renault, Suez, Michelin, Sodexo et d’autres : les dirigeants de plusieurs entreprises ont annoncé une baisse de leur rémunération, affichant une prétendue solidarité avec les salariés mis en chômage partiel.
À l’heure où le gouvernement veut faire payer la crise au monde du travail, où des millions de travailleurs se voient imposer une baisse de salaire de 16 %, où il aide le patronat à imposer des semaines de 60 heures et la suppression de repos et de congés payés, il serait malvenu que celui-ci étale sa fortune et son opulence. Ainsi, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a fait mine de conditionner la prise en charge par l’État du chômage partiel au non-versement des dividendes et à la baisse du salaire des dirigeants, qui devrait représenter, selon la secrétaire d’État à l’Économie, 25 % de la rémunération totale.
L’Association française des entreprises privées (AFEP), qui dit représenter les intérêts des 113 plus grandes entreprises françaises, l’a bien entendu et a appelé ses adhérents à suivre ce bon conseil. Son président, Laurent Burelle, également dirigeant de l’équipementier automobile Plastic Omnium, a lui-même baissé temporairement d’un quart son salaire de 89 826 euros annuel. Il se contentera de toucher, avec les membres de sa famille, les 30 millions d’euros de dividendes auxquels il n’a par contre pas renoncé.
Le PDG du groupe Kering, François-Henri Pinault, fils de François, toucherait 960 000 euros au lieu de 1,2 million en 2020 et abandonnerait une partie de sa rémunération variable, estimée entre 1 et 2 millions. Mais avec 25,5 milliards de dollars de fortune personnelle, il a de quoi voir venir.
Florent Menégaux, le président de Michelin ne percevra, lui, pendant deux mois que 25 % de son salaire fixe estimé en 2018 à 554 672 euros annuels. Il dit aussi renoncer à une partie de la part variable dudit salaire de 2019, versée en 2020, et qui, pour 2018, se montait à 668 479 euros. Il n’a rien dit par contre d’éventuelles stock-options ou autres revenus qui font toujours partie de la rémunération des grands patrons. Les membres du conseil de surveillance de Michelin ont, eux, annoncé reverser 25 % du montant leurs jetons de présence à diverses fondations. Sans doute cela sera-t-il dégrevé d’impôts. Quant à Bertrand Camus, le PDG de Suez il renoncerait à un quart de ses 750 000 euros annuels de salaire, de même que les membres du comité exécutif du groupe. L’argent ainsi économisé sera généreusement reversé à l’institut Pasteur et à l’Unicef, via la fondation Suez. Une bonne publicité, avec en prime une ristourne fiscale : coup double.
Il n’est évidemment pas question pour ces patrons richissimes, pour ces multinationales assises sur un tas d’or, de compléter à 100 % le salaire des travailleurs en chômage partiel. Cela serait pourtant la moindre des choses.