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Bangladesh : les patrons du textile font la loi
Apprenant que le confinement prenait fin le 1er août pour les usines textiles, des centaines de milliers de Bangladais se sont rués la veille sur les transports en commun surchargés afin de regagner à temps leur usine.
L’épidémie de Covid a durement frappé le Bangladesh. Officiellement, sur une population de 169 millions d’habitants, 1,2 million ont été touchés par le virus et 20 000 en sont morts, mais le bilan réel est probablement bien supérieur. Face à la propagation du virus, le gouvernement avait décrété un confinement entre le 23 juillet et le 5 août, venant après la fermeture de nombreuses usines dès le 17 juillet pour les fêtes de l’Aïd où beaucoup de travailleurs étaient retournés dans leur famille.
Cela ne faisait pas l’affaire des gros industriels du textile qui ont usé de pressions sur le gouvernement, s’apparentant à du chantage, pour accélérer la date de réouverture de leurs entreprises. Une fermeture prolongée aurait risqué de leur faire perdre leur place sur le marché international, créé des ruptures sur les chaînes de production, engorgé les ports et affecté toute l’économie du pays. De plus les travailleurs restant dans leur village n’auraient pas accès aux vaccins. Il n’en a pas fallu plus pour que le gouvernement bangladais cède à leurs revendications. Sur un total de 2 725 usines du textile, 2 312 avaient rouvert le 1er août.
Quant aux travailleurs du textile, la peur de perdre leur emploi et toute source de revenus s’ils n’étaient pas revenus à temps les a fait se précipiter sur n’importe quel moyen de transport. Environ 84 % d’entre eux étaient à leur poste le jour de la réouverture. Dans quelles conditions face à l’épidémie ? Les syndicats dénoncent le manque de protocole sanitaire pour les travailleurs dans les usines : aucune distance de sécurité, peu de possibilités de se laver les mains, le port du masque serait le seul critère à peu près respecté. Ils réclament aussi le maintien dans leur poste de travailleurs qui n’auraient pu rentrer dans les temps impartis ainsi que le paiement des jours chômés.
Parmi les pays fournissant les enseignes de mode occidentales, le Bangladesh, second producteur avec 4,4 millions de salariés, est celui qui a subi le plus gravement les effets de la pandémie. Les salaires ont baissé en moyenne de 27 % et la presque totalité des travailleurs a dû s’endetter pour payer sa nourriture, son logement et ses dépenses de santé.
Au Bangladesh, les ouvriers risquent déjà leur vie dans des usines où la sécurité est le dernier des soucis des patrons du textile. À cela s’ajoute maintenant le risque d’y laisser leur santé, voire leur vie, avec le Covid, pour des salaires permettant encore moins qu’auparavant de satisfaire les besoins élémentaires. Mais les grands groupes occidentaux, dont Carrefour et Auchan pour la France, acceptent de fermer les yeux sur les conditions ainsi faites aux travailleurs et pires encore pour les travailleuses. Du moment que leurs bénéfices gonflent…